
La Chine voit rouge avec Omicron

La plupart des pays ont appris à vivre avec le Covid mais la stratégie de tolérance zéro face à la pandémie de la Chine risque d’avoir un impact significatif sur la croissance mondiale. Dans sa dernière note de conjoncture, la Banque de France a revu en baisse sa prévision de croissance de moitié pour l’Hexagone au premier trimestre à 0,25%, en raison du conflit en Ukraine mais aussi parce que «face au regain de l'épidémie de Covid-19, la Chine a réinstauré des mesures de confinement dans certaines régions, ce qui a pu renforcer les difficultés d’approvisionnement des entreprises».
La situation s’est nettement dégradée ces dernières semaines avec une forte propagation du variant Omicron obligeant les autorités chinoises à confiner davantage de villes. A Shanghai, où le gouvernement local avait dans un premier temps opté pour une approche plus flexible, le confinement touche désormais toute la ville et est plus long qu’anticipé.
«Le coût économique de la politique zéro-Covid est substantiel car certaines des plus grandes villes telles que Shanghai sont sous confinement, la crise logistique s’aggrave, les usines sont contraintes de fermer du fait des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement en raison du manque de travailleurs, les ventes de maisons ont chuté tandis que les entreprises privées donnent la priorité à la survie plutôt qu'à l’expansion», décrit Ting Lu, économiste chez Nomura. Iris Pang, économiste chez ING, estime que cela a un impact de 6% sur le PIB de la ville et de 2% sur le PIB chinois, et prévient que ce problème chinois sera un problème pour la croissance mondiale.
«La Chine, deuxième économie et premier fabricant mondial, fait face à un risque croissant de récession depuis la mi-mars, mais les marchés mondiaux semblent encore sous-estimer son impact car une grande partie de l’attention reste concentrée sur le conflit russo-ukrainien et les hausses de taux de la Fed», avertit Ting Lu. Un éventuel arrêt brutal du secteur manufacturier chinois serait un choc majeur pour l’économie mondiale, la Chine exportant jusqu’à un tiers des biens intermédiaires dans le monde. «Cela s’ajoute aux problèmes de transport potentiels, qui se manifestent déjà par une nouvelle hausse des coûts de transport», ajoute Alicia Garcia Herrero, chef économiste Asie chez Natixis CIB pour qui la stratégie zero Covid est de loin le plus important choc économique pour 2022.
Pour l'économiste de Nomura, 45 villes chinoises ont instauré des confinements totaux ou partiels. Les autorités, conscientes de l’impact sur l’activité, adoptent parfois des approches plus souples. Cela représente un bassin économique de près de 400 millions d’habitants et de 40% du PIB de la Chine, le double de la semaine précédente. La stratégie zéro-Covid étant peu efficace face à un variant très contagieux comme Omicron, cette situation risque de durer encore plusieurs semaines. Ting Lu note par ailleurs que les gouvernements locaux se font concurrence pour être le meilleur élève dans cette stratégie zéro-Covid, avant le Congrès du parti en fin d’année, ce qui peut avoir un effet encore plus néfaste sur l’économie.
Recul des importations
L’activité a nettement ralenti. Un indice de transport par route a chuté de 25% au cours des dix premiers jours d’avril. Les données du commerce extérieur chinois, publiées mercredi, reflètent également en partie cette chute de l’activité. Les importations, qui étaient attendues en hausse de 8%, sont restées quasiment stables sur un an. Les exportations ont été un peu meilleures qu’anticipé. Iris Pang indique qu’une grande partie de la baisse des importations est liée à la chute de celles de produits pétroliers. Mais cela n’explique pas la totalité. Ting Lu estime que la situation actuelle devrait avoir un impact sur les exportations en avril, qu’il anticipe stables, et sur les importations (-3%).
Face à ce contexte, les économistes attendent une réaction de la banque centrale. La PBoC pourrait baisser son taux moyen terme dès vendredi, d’autant que le Conseil d’Etat, le conseil des ministres chinois, a affirmé cette semaine qu’un soutien serait nécessaire face au risque de ralentissement. Ting Lu anticipe une baisse de 10 points de base (pb) et Iris Pang de 20 pb des taux. Mais la banque centrale pourrait privilégier une baisse de 50 pb du taux des réserves obligatoires de banques, plus efficace et plus ciblé que l’action sur les taux, comme en décembre.
Plus d'articles du même thème
-
La Chine riposte aux Etats-Unis et donne un nouveau coup de massue aux marchés
Les actions européennes plongent de nouveau après que Pékin a dévoilé une série de mesures en réponse aux droits de douane américains. -
La Chine cherche la bonne réponse à la guerre commerciale
Le gouvernement chinois s’est pour l’instant contenté de mots, et défend encore la valeur de sa devise. Pékin s'est aussi rapproché de Séoul et Tokyo. -
Washington applique à ses partenaires commerciaux un calcul simpliste
Les Etats-Unis ont annoncé l’application de droits de douane particulièrement élevés contre la plupart des pays du monde. Présentés comme «réciproques», ces «tariffs» découlent en réalité de l’application d’une formule mathématique basique.
ETF à la Une
- La Banque Postale débarque le patron de sa banque privée
- A la Société Générale, Slawomir Krupa se prépare à la taylorisation des banques
- La Société Générale prend le risque d'une grève en France fin mars
- Une nouvelle restructuration à la Société Générale ne plairait pas aux investisseurs
- Le CCF a perdu une centaine de millions d’euros l’an dernier
Contenu de nos partenaires
-
Pénuries
En combat air-air, l'aviation de chasse française tiendrait trois jours
Un rapport, rédigé par des aviateurs, pointe les « vulnérabilités significatives » de la France en matière de « supériorité aérienne », décrivant les impasses technologiques, le manque de munitions et les incertitudes sur les programmes d'avenir -
Escalade
L'armée algérienne passe à la dissuasion militaire contre la junte malienne
La relation entre Alger et Bamako ne cesse de se détériorer ces derniers mois alors qu'ex-rebelles et armée malienne s'affrontent à la frontière algérienne -
En panne
Pourquoi les Français n’ont plus envie d’investir dans l’immobilier
L’immobilier était le placement roi, celui que l’on faisait pour préparer sa retraite, celui qui permettait aux classes moyennes de se constituer un patrimoine. Il est tombé de son piédestal. La faute à la conjoncture, à la hausse des taux, à la chute des transactions et à la baisse des prix, mais aussi par choix politique : le placement immobilier a été cloué au pilori par Emmanuel Macron via une fiscalité pesante et une avalanche de normes et d’interdictions