
Comment l’Europe doit se préparer à une possible guerre commerciale

La guerre commerciale mondiale aura-t-elle lieu ? Elle a déjà un peu commencé depuis que les Etats-Unis ont décidé de mettre en place des droits de douane supplémentaires de 25% sur les importations d’acier et de 10% sur celles d’aluminium en provenance de l’Union européenne (UE) le 1er juin au nom de la sécurité nationale, relève une note du Conseil d’analyse économique (CAE) publiée mardi 3 juillet.
A cette initiative s’est ajoutée la menace explicite de droits de douane à hauteur de 25% sur 50 milliards de dollars d’importations en provenance de Chine, ajoutent les auteurs de la note, Sébastien Jean, Philippe Martin et André Sapir. L’administration américaine accuse Pékin de violations en matière de protection de la propriété intellectuelle. En juin, Donald Trump a encore durci le ton avec cette fois la menace de droits de douane de 10% sur 200 milliards de dollars d’importations.
«Le scénario d’une escalade protectionniste au niveau mondial ne peut plus être exclu», prévient le CAE. Il a évalué les conséquences d’une «guerre totale», qui signifierait que le commerce de la France hors UE baisserait d’environ 42%. «La perte permanente de PIB serait de plus de 4% pour l’Union européenne et de plus de 3% pour la France, soit une perte annuelle d’en moyenne 1.250 euros par habitant dans l’UE et 1.125 euros par habitant en France», ont chiffré les auteurs.
Une telle guerre commerciale aurait un effet permanent sur le PIB par habitant d’ampleur similaire pour les trois grandes puissances mondiales (Union européenne, États-Unis et Chine), d’environ 3 à 4% de PIB, précisent-ils. Un impact comparable à celui de la Grande récession de 2008-2009.
stratégies de contournement
Face à ce risque, l’UE doit «combiner l’adoption de mesures de rétorsion fermes et crédibles (…) et l’initiative d’une offre de négociations multilatérales ou plurilatérales sur les sujets légitimes», estime le CAE, tout en défendant ce qui reste du multilatéralisme incarné par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Face aux intransigeances de l’administration américaine, l’UE a besoin d’un plan B qui consisterait à «fédérer un club de pays afin d’identifier et mettre en œuvre des stratégies de contournement du blocage américain de l’OMC» et de son organe d’arbitrage (ORD). Ces pays s’engageraient à ne pas recourir à cet organe d’appel en cas de recours devant l’OMC. Autre recommandation, renforcer certains des règlements de l’OMC en matière de réciprocité des engagements, des règles sur les subventions, les entreprises d’État et de droit de la propriété intellectuelle.
Enfin, à ceux qui jugeraient assez modestes les gains économiques que l’UE pourrait tirer de toutes ces mesures de défense du commerce international, le CAE répond qu’«au-delà des gains d’efficacité traditionnels, d’autres dimensions de ces accords doivent être intégrées». Il peut s’agir de l’environnement avec la question du réchauffement climatique ou encore la question de l’évasion fiscale. L’UE pourrait exiger dès la conception de ces accords des engagements opposables dans ces domaines, avec à la clé le rétablissement de barrières commerciales en cas de violation. Ainsi le respect des codes de bonnes pratiques de l’OCDE et le plan d’action BEPS dans un cadre multilatéral devraient devenir des éléments constitutifs des accords futurs, mentionne le CAE.
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