
Orange ou la menace fantôme

Le moment tant attendu – ou redouté – est arrivé. Orange lance ce 2 novembre sa banque digitale en France. L’irruption de l’opérateur télécoms sur le marché des services financiers aura-t-elle le même impact que celle de Free dans la téléphonie mobile ? Sur le papier, les conditions semblent réunies pour nourrir la guerre commerciale. Le groupe claironne sa volonté de casser les codes du secteur, peut marier ses compétences technologiques à la capacité de distribution d’un réseau d’agences, et a surtout les reins assez solides pour supporter des années d’exercice déficitaire dans cette nouvelle activité, contrairement aux start-up qui se lancent en même temps que lui.
L’analogie avec Free s’arrête là. Le groupe de Xavier Niel voulait réveiller un marché cadenassé par trois grands acteurs, et sa stratégie low cost marquait en 2012 une vraie rupture. L’oligopole bancaire, lui, n’a pas attendu Orange pour être attaqué de toutes parts (lire Horizons). Les premières banques en ligne ont atteint l’âge adulte, les grandes enseignes d’assurance ou de distribution se sont essayé aux services financiers avec plus ou moins de bonheur, et les dernières années ont vu fleurir quantité de fintech. A défaut de pouvoir proposer une offre complète, les jeunes pousses de la finance ciblent les maillons les plus standardisés de la chaîne de valeur et insufflent dans le marché une dose d’innovation bienvenue. Les grands établissements de crédit, bien conscients de cette menace polymorphe, ont déjà préparé la riposte en concoctant des offres mobiles à bas prix qui rendront le marché encore plus concurrentiel ces prochains mois et en rachetant les acteurs les plus dynamiques, comme Compte Nickel.
Orange Bank, dont le service ne présente pas à ce stade de caractère résolument original, a donc le potentiel de comprimer les prix et de rendre plus fidèles les abonnés de sa maison mère, pas forcément de déplacer les foules. Ce concurrent presque comme les autres ajoutera une variable à l’équation de la rentabilité, qu’aucune offre digitale n’a encore réussi à résoudre. Mais pour les banques traditionnelles, la vraie bataille à mener est ailleurs : c’est celle de la donnée client et de la relation directe au consommateur, un terrain où chassent des géants autrement plus menaçants et où la rupture technologique apportée par la fintech semble trouver tout son sens. Qu’elles perdent ce lien avec leur fonds de commerce au profit d’agrégateurs ou de spécialistes du « parcours client », et elles se verront reléguées au rang de simples usines de fabrication de produits financiers, un statut bien moins rémunérateur. C’est sans doute du côté de la « data » qu’il faut aller chercher le futur Free de la banque.
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