Les banques espagnoles se rebiffent contre la surtaxe de leurs résultats

Elles militeraient actuellement pour inclure les filiales de leur concurrentes étrangères opérant en Espagne dans le périmètre de l’impôt exceptionnel.
Stéphanie Salti, à Madrid
drapeau espagnol Espagne Madrid
Les banques espagnoles manœuvrent pour que la proposition de loi sur la taxe bancaire soit amendée de façon à y inclure les banques étrangères.  -  Photo DR.

Depuis la révélation fin juillet de détails de la taxe bancaire décidée par le gouvernement de Pedro Sanchez, les mastodontes de la banque espagnole ne décolèrent pas. En cause : le traitement des activités espagnoles des banques étrangères qui plonge le secteur dans la confusion la plus totale. « Le texte de la proposition législative actuelle ne précise pas le domaine d’application », explique Chiara Romano, directrice associée chez Scope Ratings, « il ne mentionne que les établissements de crédit. Mais dans l’introduction, il fait référence aux grands établissements de crédit espagnols. Il semblerait donc que les opérations des banques étrangères en Espagne en soient exclues ».

Danel Izqueaga, associate director dans l'équipe banques de Fitch Ratings, propose une autre interprétation : « selon le projet de loi, toute banque ayant des opérations en Espagne et ayant enregistré plus de 800 millions d’euros de revenus nets d’intérêts et de frais et commissions nets en 2019 sera soumise à la taxe », explique-t-il, « de nombreux doutes subsistent néanmoins sur la situation de certaines banques étrangères car on ne sait pas encore comment sera calculée cette taxe : les revenus nets d’intérêts et les frais et commissions de certaines entités dépassent le seuil de 800 millions d’euros sur une base consolidée (y compris certaines filiales) mais pas sur une base individuelle. Par ailleurs, d’autres banques, qui ont enregistré un montant légèrement inférieur à 800 millions d’euros de revenus nets d’intérêts et de commissions en 2019, pourraient dépasser ce seuil en 2022. Or, en principe, elles ne devraient pas être soumises à la taxe. Sur ce point, le texte manque aussi de clarté ».

Le cas BNP Paribas est décortiqué

Le cas de BNP Paribas a ainsi piqué la curiosité de la presse espagnole : présente en Espagne au travers d’un vaste éventail d’activités - activités bancaires, crédit à la consommation (Cetelem), activités de titres (Securities Services) etc..-, la première capitalisation bancaire française pourrait ainsi être contrainte de s’acquitter de cette taxe sur une base consolidée. «D’un point de vue purement numérique, BNP Paribas a réalisé environ 1,2 milliard d’euros de revenus en Espagne en 2019, de sorte que ses revenus d’intérêts et de commissions seraient probablement au-dessus du seuil de 800 millions d’euros si elle était éligible à cette taxe », estime Chiara Romano. Selon des calculs de El Confidencial, le leader français pourrait ainsi faire face à une facture de quelque 40 millions d’euros d’impôts. Contactée, BNP Paribas n’était pas en mesure de répondre à nos questions, avant bouclage.

Des voix bancaires se font aussi entendre pour inclure d’autres établissements étrangers à l’image d’ING, qui a réalisé l’an dernier des revenus de 776 millions d’euros en Espagne ou encore Deutsche Bank. Contactés, ces deux établissements n’ont pas souhaité faire de commentaires.

Un impôt estimé à 3 milliards pour deux ans

Dans ce climat de confusion, les banques espagnoles feraient ainsi actuellement pression pour que la proposition de loi sur la taxe bancaire, qui doit encore être débattue au Parlement, soit amendée de façon à garantir l’inclusion des banques étrangères dans l’équation. Ce nouvel équilibre permettrait ainsi de répartir cet impôt, qui doit rapporter 3 milliards d’euros sur deux ans, plus équitablement entre tous les acteurs présents sur le sol espagnol. A l’heure actuelle, on estime que la taxe devrait entraîner une réduction de 25,5% du bénéfice attendu de Sabadell cette année et de 30,7% en 2023, selon Jefferies. CaixaBank devrait aussi payer le plus lourd tribut fiscal, avec un impôt de 461 millions d’euros cette année, soit 16,4 % du bénéfice annuel, selon Expansion.

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