
BCE, une question de génération

Lors du récent sommet de l’Union, les dirigeants européens n’ont pu s’accorder sur les postes-clés de cette dernière. Le seul bon côté de ce blocage est d’avoir mis fin au système baroque du « Spitzenkandidat » que le parti arrivant en tête de l’élection européenne aurait, paraît-il, le droit de placer à sa guise à la tête de la Commission. Comme si le système politique de l’Union n’était qu’un régime parlementaire comme un autre, reléguant les chefs d’Etat et de gouvernement au rôle de faire-valoir ! La recherche du meilleur candidat possible demeure en cours d’ici au 30 juin, et c’est tant mieux. Il en est de même pour le poste, ô combien essentiel, de président de la Banque centrale européenne (BCE). Là encore, il faut espérer que le candidat – aucune femme ne figure parmi les nominés – disposant des meilleurs atouts l’emportera, nonobstant les considérations d’équilibres entre pays-membres et autres calculs plus ou moins avouables.
Plusieurs candidats disposant d’incontestables références sont sur les rangs pour cette capitale fonction, et pour succéder à un homme, Mario Draghi, qui a rempli son mandat avec un exceptionnel brio. Au-delà de ses qualités d’économiste, il a pleinement compris et maîtrisé les canons de la communication en un temps, les lendemains de la crise financière, où cette compétence, naguère secondaire, s’avère cruciale. Son célèbre « Whatever it takes » ne procédait pas seulement d’une audace de langage, mais d’une créativité à la hauteur de l’événement systémique que constituait la crise de la zone euro. Cette créativité, il faudra la trouver aussi chez son successeur, ce qui a pour conséquence d’éliminer la candidature du président de la Bundesbank, qui n’a cessé de ferrailler contre les initiatives non-conventionnelles du directoire de la BCE. Leur succès n’a certes été que relatif, et non exempt de menaces, notamment pour les banques ; mais si Jens Weidmann avait été écouté, la zone euro serait plongée dans une récession déflationniste. Malgré son tardif repentir, l’homme a montré qu’il n’était pas taillé pour le poste.
Or l’imagination devra encore être au pouvoir dans l’avenir immédiat. Le changement climatique, par exemple, appelle les banques centrales à modifier leur approche pour inciter, voire contraindre, tout le système financier à adapter ses principes d’investissement et de communication afin d’assurer une stabilité compatible avec un financement durable. De même, l’irruption spectaculaire de Facebook sur la scène monétaire lance aux régulateurs, et d’abord aux banquiers centraux, des défis nouveaux, à commencer par la qualification du nouvel actif « libra » et l’appréciation de ses risques. La capacité de penser pertinemment ces champs encore vierges, sans abandonner les règles éprouvées de prudence dans la gestion monétaire, milite pour un changement de génération. Pour penser le rôle d’une banque centrale pour les générations futures, mieux vaut un candidat en phase d’âge et d’esprit avec elles. Que la France en ait deux dans ce cas la place en bonne position pour le job. On ne s’en plaindra pas.
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