A la manœuvre pour organiser le retour progressif de leurs salariés sur le lieu de travail, les dirigeants d’entreprise doivent être vigilants sur leur responsabilité pénale en cette période d’état d’urgence sanitaire. En effet, « il n’y a pas d’éxonération de la responsabilité pénale pour les dirigeants », rappelle Jacques-Henry de Bourmont, associé chez Jeantet. Ces risques pénaux concernent le droit du travail. « L’obligation de sécurité et de protection des salariés (art. L4161-1 du Code du travail) est un grand sujet de préoccupation pour les dirigeants puisque leur responsabilité pourrait potentiellement être engagée en cas de contagion sur le lieu de travail, observe Eva Kopelman, counsel chez Jeantet. Chaque entreprise doit trouver la bonne formule pour être en phase avec les préconisations du ministère du Travail. » Les employeurs doivent ainsi mettre à jour le « document unique d’évaluation des risques professionnels » (DUERP) en y insérant une partie spécifique sur les risques du Covid-19 et les mesures à mettre en œuvre pour préserver les salariés. Ils doivent aussi prévenir les risques et veiller au respect des consignes de prévention et de l’utilisation des équipements individuels de protection. En cas de non-respect de l’obligation de sécurité des salariés, les sanctions sont civiles et pénales. Sur le plan civil, il s’agit de la faute inexcusable (une fiche pratique du ministère du Travail du 25 mars 2020 a apporté des précisions). Sur le plan pénal, il s’agit de l’infraction de la mise en danger d’autrui (art 223-1 du Code pénal). « La question est particulièrement d’actualité, de nombreuses plaintes ont déjà été déposées à l’encontre d’élus et de chefs d’entreprise, note Hortense Béthune, associate. Le risque de contamination d’un salarié au sein de l’entreprise cristallise le plus d’incertitudes et d’interrogations. » Mais il existe en pratique des difficultés de qualification de cette infraction dans le contexte actuel. « Il faut un lien de causalité direct et immédiat entre la faute (l’exposition d’autrui) et le dommage (le risque de mort ou de blessure permanente). Or il est très difficile d’établir avec certitude l’origine du risque de contamination du salarié », prévient Hortense Béthune.