Patrimoine

Nicolas Otton, directeur de BNP Paribas Banque Privée : « Nous allons renforcer nos liens avec les jeunes entrepreneurs»

Le successeur de Béatrice Belorgey revient sur la stratégie menée par BNP Paribas Banque Privée durant la crise sanitaire et sur la volonté de la banque d’accompagner dans la durée les jeunes chefs d’entreprise, en s’appuyant sur un maillage étroit des territoires.
Jean-François Tardiveau
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L’Agefi Actifs : - Quel bilan tirez-vous de l’année 2020 et de la crise sanitaire pour BNP Paribas Banque Privée ?

Nous avons traversé une crise inédite qui a entraîné l’arrêt de l’économie. Cela nous a néanmoins permis de réfléchir à la soutenabilité de notre modèle économique face aux enjeux sociaux et environnementaux. De cette crise émergent des voies nouvelles, qui deviennent des évidences collectives, en matière de transition énergétique, de santé ou d’évolution du cadre de vie professionnelle. Dans ce contexte, la banque, et notamment BNP Paribas, a joué son rôle en tant que service essentiel pour la société et le bon fonctionnement de l’économie. Elle a participé à la stabilisation du système économique avec la mise en place des prêts garantis par l’Etat (PGE) et de l’ensemble des dispositifs d’aides. La banque s’est également inscrite comme l’une des clés du rebond…

Sur ce dernier point, comment cela se matérialise-t-il dans une banque privée comme la vôtre ?

Notre rôle en tant que banque privée est de contribuer au financement de l’économie réelle et à la relance économique, tout en permettant à nos clients de donner du sens à leur épargne. C’est un phénomène nouveau mais fort. Par ailleurs, dans une période comme celle que nous traversons, il est essentiel de maintenir une grande proximité avec nos clients, et cela a été en 2020 un élément capital que nous nous sommes attachés à préserver. Ils ont pleinement bénéficié de nos plateformes digitales durant les confinements, en conservant leur autonomie et en gardant une relation de proximité avec leur banquier privé. Ce point est très important. Derrière nos outils digitaux, il y a des banquiers que les clients connaissent. Le digital n’a de valeur que s’il favorise les contacts humains.

Justement, quelles remontées avez-vous eues de la part de vos clients, notamment sur cette possibilité de « garder le contact » ? Qu’ont-ils apprécié ?

Il est clair que la solidité du groupe BNP Paribas est une véritable réassurance pour eux. Adossée à un grand groupe, la banque leur offre une sécurité appréciable dans un contexte chahuté. En outre, si l’on se focalise sur la seule banque privée, nous disposons de 108,5 milliards d’euros d’actifs et comptons un effectif de 1.700 personnes. Cela fait de nous une entreprise de la taille d’une entreprise de taille intermédiaire (ETI), possédant l’agilité et la dimension humaine propres à ce type d’établissement.

Le métier de la banque privée est un métier d’artisans puisque nous proposons des solutions personnalisées. Depuis le début de la crise sanitaire, nous avons pu mettre en place très rapidement des solutions de contact. L’ensemble de nos centres de banque privée sont restés ouverts durant les deux confinements afin d’assurer la continuité de service à nos clients. Cela a été possible d’une part grâce à notre implantation dans les régions, et d’autre part, grâce à notre hiérarchie légère et la présence de circuits courts dans les décisions. Tout cela participe à la grande agilité et rapidité que j’évoquais.

Sur ces douze derniers mois, où avez-vous placé vos priorités en matière de développement ?

Nous avons continué à avancer sur nos projets, à innover. A titre d’exemple, ces trois derniers mois, nous avons développé et formé une quarantaine d’experts financiers, sur la base d’un nouveau métier au sein de la banque, qui sont actuellement en cours de déploiement dans les régions. Ainsi, notre objectif est de renforcer notre expertise dans les territoires, et répondre à nos clients en proie aux incertitudes liées à la période que nous traversons. En outre, grâce à notre service à distance, « E-Private » lancé l’année dernière, nos clients peuvent désormais non seulement entrer en contact avec leur banquier ou un expert financier ou patrimonial mais aussi souscrire les produits à distance via la signature électronique, aujourd’hui mise en œuvre sur l’ensemble de notre offre. Nous avons également lancé « MyMand@te » qui permet à nos clients de personnaliser leurs choix d’investissement, comme par exemple dans la biotech-santé, les technologies ou les grands enjeux sociétaux (concernant l’ISR, 50 % de nos clients se tournent vers ce type de mandat). Ils peuvent modifier et arbitrer leurs investissements en toute autonomie, et leur banquier privé est tenu informé de leurs choix.

A l’inverse, quels sont les domaines où vous estimez que vous pourriez encore vous améliorer ?

J’ai l’ambition, notamment compte tenu de mon parcours de banquier d’entreprises en région, de renforcer nos liens avec les jeunes entrepreneurs, et ce dès le début de leur parcours. L’avenir est là. Jamais notre pays n’a enregistré autant de créations d’entreprises et il est primordial d’accompagner les jeunes entrepreneurs, dès l’origine de leur projet et pas uniquement au moment de la cession de leurs biens professionnels. Nous avons les ressources nécessaires avec nos 200 banquiers «entreprises » répartis sur le territoire, auxquels s’ajoutent une centaine de professionnels dédiés à des actionnaires-dirigeants, installés dans nos centres d’affaires. Il nous faut poursuivre dans cette voie. Je dirais que le banquier qui a une culture de l’entreprise et de la banque privée dispose d’avantages conséquents.

En matière d’offre de services et de produits, avez-vous relevé des tendances propres à la clientèle de la banque privée ?

Nous interrogeons chaque année 10.000entrepreneurs dans le monde, ce qui constitue un formidable terreau de tendances. Nous observons dans l’édition de 2020 un véritable engouement pour l’ISR et l’ESG. Plus de la moitié des entrepreneurs interrogés intègrent des investissements responsables dans leur portefeuille et 70 % souhaitent investir davantage dans cette logique. Mais si la majorité d’entre eux ont entendu parler d’ISR, tous n’ont pas le même niveau de connaissance du sujet. C’est une tendance qui requiert de notre part beaucoup de pédagogie, d’expertise et d’accompagnement. Voilà pourquoi nous proposons à nos clients de définir leur profil d’investisseur responsable, et de déterminer leur choix d’investissement dans la santé, le développement durable, la transition énergétique ou encore l’éducation. A partir de notre outil « My Impact », plus de 3.500 clients ont déjà défini leur profil d’investisseur, en fonction des objectifs de développement durable de l’ONU, nous permettant ainsi de leur proposer un choix de placements ciblés en fonction de leurs sensibilités. Une autre grande tendance ressort, confirmée par notre filiale Portzamparc, et portant sur un nouvel intérêt pour l’investissement dans les titres en direct, ainsi que la volonté d’investir dans l’économie réelle et la transition énergétique. Enfin, un dernier mouvement se dessine : la grande appétence pour les investissements dans les actifs non cotés, dont beaucoup de propositions concernent le private equity. A titre d’illustration, l’un des métiers de Portzamparc est en charge de l’accompagnement des PME et ETI dans leur introduction en Bourse. Et pour vous donner un aperçu de l’intérêt porté récemment par les investisseurs professionnels et particuliers, la récente introduction de Hydrogen Refueling Solutions nous a permis de battre le record de levées de fonds sur Euronext Growth en atteignant 100 millions d’euros. Compte tenu de la période, cet engouement est à signaler…

Quelle analyse faites-vous du secteur de la banque privée ? Seriez-vous prêt, par exemple, à participer à un mouvement de consolidation que beaucoup prédisent ?

En matière de consolidation, il y a des annonces. Et les raisons pour expliquer ce mouvement sont nombreuses, dont l’importance et le poids de la réglementation et naturellement, l’environnement économique de taux bas qui perdure. Retenons qu’il est nécessaire pour une banque privée d’apporter toujours des solutions à forte valeur ajoutée. Dans ce contexte, faire partie du groupe BNP Paribas nous permet de travailler aux côtés d’autres entités intégrées, gérant d’actifs ou assureur par exemple. C’est un avantage indéniable pour imaginer les produits de demain, comme le démontre le lancement récent du fonds Harmony Prime dont le portefeuille mixe des actifs cotés avec du private equity. Nous privilégions notre développement en interne et nous nous sommes donnés pour cela trois axes principaux : les entrepreneurs en nous appuyant également sur les synergies avec le réseau de la banque ; la progression de notre part de marché en matière d’épargne financière et durable ; et enfin, un renforcement de notre maillage du territoire via nos experts financiers.

Il n’empêche que la concurrence est forte dans le domaine de la banque privée. Au sein même de la segmentation de la clientèle, où est-elle la plus forte ?

La concurrence est certes réelle mais elle est également très stimulante. Face à des pure players, des boutiques ou des filiales de grands réseaux bancaires, nous nous inscrivons pleinement dans le panorama. Si l’on se réfère à une segmentation de la clientèle disposant d’un patrimoine financier compris entre 250.000 euros et un million d’euros, ou entre un million et cinq millions, ou encore supérieur à cinq millions d’euros, nous sommes en concurrence avec l’ensemble des acteurs ! Cela étant, en accompagnant des entrepreneurs dès le début de leurs projets, la segmentation n’a plus grand sens. Nous voulons être à leurs côtés dans la durée et donc suivre leur évolution patrimoniale.

Quel rôle BNP Paribas entend jouer en 2021? Quelles sont ses ambitions ?

Pour 2021 nous espérons d’abord une sortie de crise. Nous le savons, elle sera porteuse de rebond et d’opportunités. En ce qui nous concerne, cette période doit permettre à nos équipes de libérer une partie du temps commercial au profit de l’accompagnement de nos clients, car dans un contexte d’incertitudes, il est primordial que nous restions à leur écoute. Le plus important est de conserver la proximité que nous avons tissée avec eux. Nous serons également très attentifs à l’évolution de la transition énergétique et à l’accélération de l’investissement socialement responsable. Nous souhaitons à ce titre disposer, à terme, d’une gamme de fonds totalement ISR. Notre ambition est qu’ils représentent 50 % de nos mandats d’ici deux à troisans.

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