Courtiers indépendants : notre avenir est-il menacé ?

L’avenir des intermédiaires en opérations de banque et services de paiement indépendants s’annonce incertain. En effet, les établissements financiers sont de plus en plus réticents pour travailler avec les indépendants du courtage en crédit à l’habitat. Et les indépendants eux-mêmes, tendent à disparaître sous les effets d’une concentration des cabinets en une seule entité, souvent détenue par des assureurs et des fonds d’investissements.
, Pour ainsi dire, notre métier est en plein paradoxe. D’un côté, ses effectifs n’ont cessé de croître et c’est ainsi que l’ORIAS comptait 6.608courtiers en crédit immobilier en France (+28,7 % par rapport à 2015), captant 40 % des emprunteurs. De l’autre, nous assistons à une baisse de plus en plus drastique des partenariats avec les banques. Elles évoquent le fait que leur process technologique ne permet plus l’intervention d’un tiers professionnel comme le courtier. Mais en fait, les banques demandent un volume de dossiers aux courtiers difficile à satisfaire compte tenu de la structure de leur cabinet (seul ou 2-3 personnes). De plus, alors que nous nous battons pour l’indépendance du conseil, nous assistons progressivement à une prise de contrôle des cabinets par des fonds d’investissement et des assureurs. De nombreuses équations déroutantes !
La triple vocation des courtiers. Au moment où le Parlement s’apprête à voter la loi Pacte, dont un volet entier insiste sur l’éducation financière des Français, les courtiers en crédit immobilier, mais aussi l’ensemble des intermédiaires se doivent de réagir pour préserver l’indépendance au service du client final. Mais aussi la bonne marche de l’économie. Sans chercher à les opposer avec les établissements financiers qui délivrent avant tout des produits, les courtiers ont une vocation sociale, économique et même démocratique vis-à-vis des consommateurs.
Inquiétante industrialisation. Bien entendu l’Europe encadre fortement nos activités et nous ne reviendrons pas sur le cadre réglementaire important que nous devons appliquer au quotidien. Mais l’Europe a fixé aussi un grand principe qui ne peut échapper à la France: la concurrence libre et non faussée. Elle doit permettre au consommateur de choisir en tout domaine, entre plusieurs acteurs d’un marché. Or, la concentration que nous voyons poindre nous inquiète, car elle va irrémédiablement conduire à « l’industrialisation du courtage en immobilier ». Donc, à l’absence de tout conseil personnalisé. Et en poussant le raisonnement, nous reviendrons davantage à une profession qui fait de la « gestion de fortune » plus qu’à une profession qui cherche à accompagner son client tout au long de son parcours de vie: achat d’un véhicule, d’une résidence principale, etc.
Les effets sur l’immobilier. Aux taux relativement bas pour les crédits immobiliers, s’annonce une hausse prévue d’après les analystes pour la fin 2019. Doit-on s’en inquiéter ? Oui et non. D’une part, c’est un marché fluctuant comme d’autres, et particulièrement cyclique. Mais c’est plutôt la conjonction d’une hausse des taux et de l’inflation qui vient brouiller les cartes. Le neuf et l’ancien vont repartir à la hausse, les crédits vont être plus chers à supporter et le coût de la vie aussi. Ce qui signifie que tout le monde ne pourra plus devenir propriétaire de son logement même si les analystes rappellent qu’en récession, cette classe d’actifs est toujours une « valeur refuge ». Frileuses et appliquant par ailleurs les règles de solvabilité de BâleIII, les banques risquent de leur côté, de se montrer beaucoup moins offensives sur la délivrance de prêts. Et si leurs partenariats avec les courtiers s’estompent, c’est le consommateur qui risque au final d’être le grand perdant. La situation a tout de même de quoi interroger en cette période où la loi Elan est promue entre autres, comme la solution pour « construire plus, plus vite, moins cher et pour un plus grand nombre ». Qui en bénéficiera alors ? Un accès à la propriété plus difficile pour les générations nées au tournant des années 1980-90 et une désaccumulation plus précoce pour celles nées dans les années 1950 est à craindre. En conclusion, il serait louable que tous les acteurs du courtage en financement coopèrent au service des consommateurs. Car, à trop vouloir renverser la table chacun de leur côté, ils vont finir par la casser.
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