La boulimie acheteuse se confirme au second semestre

Les amateurs d’art ont grand soif de photographie, tant et si bien qu’il se vend aux enchères deux fois plus de photographies qu’il y a dix ans. Cette boulimie acheteuse est importante à entretenir pour les sociétés de ventes qui ont doublé leurs recettes sur la décennie, avec des niveaux de prix de plus en plus élevés.
Au début des années 2000, seule une épreuve atteignait chaque année le graal du marché haut de gamme, celui des oeuvres récompensées à plus de 500.000 euros. En 2013, 14 photographies passaient déjà le seuil des 500.000 euros... sur le premier semestre, avec un goût nettement prononcé pour la période contemporaine. D’autres résultats de cet ordre ont alimenté les ventes de fin d’année.
New York domine. New York, capitale du marché haut de gamme, s’impose fermement face à Londres et Paris. La Grosse Pomme tient 57 % du marché mondial et ses recettes photographiques sont en hausse de 151 % sur la décennie. La par Artprice.com© vente la plus importante de l’année s’est tenue le 12 novembre dernier chez Christie’s, avec de nouvelles enchères spectaculaires : Cindy Sherman a ajouté deux adjudications millionnaires à son palmarès, dont une pour une photographie de 1979 : Untitled #48. Ce cliché noir et blanc, issu de la première série de l’artiste, est une denrée rare (aucune #48 n’était parue dans le circuit des enchères depuis 2004) qui témoigne bien de l’ascension astronomique des prix puisque cette épreuve a gagné un million de dollars en moins de dix ans ! Le même jour, Christie’s signait aussi la troisième enchère millionnaire du duo Gilbert & George avec Red Morning (Hate), une oeuvre de 1977 estimée entre 1,5 et 2,5 millions de dollars. L’estimation basse atteinte (équivalente à 1.120.950 euros) double la valeur de cette oeuvre par rapport à 2005 (Red Morning-Hate) qui avait été adjugée 750.000 dollars le 8 novembre 2005 chez Christie’s New York).
Les contemporains plus prisés que les pionniers. Les artistes vivants sont devenus plus rentables que les pionniers de la photographie, une tendance qui s’explique tant par la raréfaction d’épreuves historiques de qualité que par les effets combinés de la mode et de la spéculation sur la production contemporaine. A l’heure actuelle, plus de 60 % des recettes sont engrangées par des L’enjeu est de taille pour les professionnels du marché car les artistes vivants sont particulièrement spéculatifs (produit de ventes en hausse de +104 % sur la décennie) tandis que les recettes des artistes décédés s’affaissent (-13 % sur la décennie).
Cindy Sherman, Richard Prince, Gilbert & George, Andreas Gursky ou encore Hirushi Sugimoto sont devenus, en dix ans, des figures incontournables des ventes aux enchères. Profitant de cette montée en puissance du marché de la photographie, les maisons de ventes Christie’s, Sotheby’s et Phillips avaient d’ailleurs organisé, en avril 2013, six ventes dédiées à la photo (près de 900 lots). Les résultats se sont révélés exceptionnels avec 18 millions d’euros hors frais (24,85 millions de dollars), soit un chiffre d’affaires au double des performances habituelles (lire L’Agefi Actifs n°592 p. 10).
Paris tente de résister. Juste après les ventes new-yorkaises, les collectionneurs se sont retrouvés à Paris où se tenait le salon Paris Photo et où les maisons donnaient des ventes. Le lot parisien le plus important de novembre 2013 est une pièce majeure d’Hiroshi Sugimoto intitulée Portraits 1999 et composée de 27 tirages argentiques : son adjudication de 400.000 euros fait d’elle la troisième meilleure enchère photographique jamais enregistrée en France, après celles de Gustave Le Gray et de Richard Avedon. Le pari était aisé car Sugimoto est le septième photographe le plus rentable au monde. Du côté de chez Sotheby’s, trois artistes ont enregistré des records pour la place de marché parisienne : Helmut Newton (Arielle after haircut Paris, 1982, lot de 10 tirages argentiques reliés en album, adjugé 190.000 euros), Bern et Hilla Becher (8 tirages argentiques de Châteaux d’eau, 1972-1997, adjugés 80.000 euros) et Thomas Struth (Musée du Louvre 2, Paris, 1990, 222 x 183 cm , édition de 10, adjugé 125.000 euros). La France tient près de 10 % du marché mondial, une part qui s’effrite année après année (malgré des recettes en hausse) tant les prix flambent aux Etats-Unis. Moins spéculative, la place de marché française constitue une bonne alternative pour acheter des photos et le choix est particulièrement large car, ne l’oublions pas, la France est le berceau historique du genre.
Art majeur. Entrée dans les moeurs des collectionneurs, la photographie n’est plus un genre à part. Totalement intégrée aux ventes de prestige, d’art contemporain notamment, elle s’impose de plus en plus fermement comme une valeur sûre du marché. Dans notre civilisation de flux d’images, la photographie est le médium le plus emblématique de notre époque, le marché l’a bien compris.
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