Aviva subit l’effet de traîne

L’acquisition de Friends Life par Aviva PLC, la plus importante fusion dans le secteur de l’assurance au Royaume-Uni depuis près de quinze ans, est polluée par les allégations dans la presse d’un assuré d’Aviva France sur le provisionnement insuffisant du risque afférent aux litiges sur les contrats d’assurance vie à cours connu. Cet assuré, détenteur d’une telle convention, est en contentieux avec l’assureur depuis de nombreuses années.
Un contentieux ancien.
Pour mémoire, ces contrats, commercialisés dans les années 80, permettent d’effectuer des arbitrages entre les différents supports, sur la base du cours connu de la dernière cotation de la semaine précédente. Comme le souligne Aviva dans un communiqué, «la cotation des Sicav était hebdomadaire et les process d’arbitrage étaient plus longs. La situation a changé depuis, sous l’effet conjugué de la généralisation de la cotation quotidienne des supports, de la rapidité d’accès à l’information, de l’évolution des techniques de passation d’ordres (…)».
Caroline Desaegher, directrice de la communication et du développement durable d’Aviva France, affirme qu’«un nombre limité de dossiers contentieux est encore en cours. Nous sommes déterminés à faire valoir le caractère infondé des demandes et à faire reconnaître par les tribunaux la mauvaise foi des demandeurs qui font un usage abusif de la clause d’arbitrage à cours connu et qui réclament des sommes extravagantes sans être jamais suivis sur ces montants par les juges. L’usage abusif de la clause à cours connu a été dénoncé par d’éminents professeurs de droit, dont les professeurs Bigot et Mayaux».
Reste qu’à ce jour, c’est la modification unilatérale du contrat et la mauvaise foi de l’assureur qui ont été sanctionnées à de nombreuses reprises par les juges, par le rétablissement des supports supprimés et le versement d’indemnités au titre du préjudice subi sur la base d’une expertise judiciaire.
Nicolas Lecoq-Vallon, avocat de l’assuré, estime qu’«Aviva est un des derniers assureurs, si ce n’est le seul aujourd’hui, à ne pas avoir soldé ce contentieux, les autres compagnies ayant transigé avec leurs clients. Aviva, qui a été condamnée au moins 30fois définitivement dans des dossiers défendus par notre cabinet, continue à ne pas exécuter ses obligations conformément au contrat malgré les décisions de justice».
Provisionnement.
Il ajoute que «la politique jusqu’au-boutiste d’Aviva l’a conduit à faire face à cinq condamnations pour un montant total de plus de 21 millions d’euros pour des périodes de un à dix ans qui sont aujourd’hui largement écoulées, car arrivant à terme pour la plupart en 2007. Les contrats étant encore en cours jusqu’au décès des assurés, Aviva pourrait être condamnée à des montants tout aussi conséquents».
Aviva comptabilise les litiges à cours connu dans les provisions techniques et non plus dans les provisions pour risques et charges. Une technique jugée peu transparente mais qui permet à l’assureur de préserver ses intérêts dans ce contentieux. La compagnie explique que «les quelques contentieux encore en cours sur le sujet n’affectent en rien la capacité d’Aviva à assumer ses engagements, y compris envers les adhérents Afer». Elle affirme se conformer au cadre réglementaire applicable à la profession.
Le contrôle de l’ACPR.
Finalement, quel meilleur gage de la sincérité des comptes d’Aviva que le silence de l’ACPR ? Ayant pour mission de veiller à la fois à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients, l’ACPR connaît le dossier de longue date puisque du temps de l’Acam, elle n’avait pas donné suite à la demande de plusieurs assurés visant à l’ouverture d’une procédure disciplinaire à l’encontre d’Aviva pour insuffisance de provisionnement des risques sur ces contrats. Le Conseil d’Etat avait d’ailleurs validé la position du régulateur en novembre en 2007. En l’occurrence, les assurés ne justifiaient pas le montant du provisionnement allégué.
La position du Conseil d’Etat serait-elle la même aujourd’hui ? Interrogé, le régulateur affirme ne pas avoir à commenter un dossier judiciaire. Quant au volet prudentiel, qui le concerne au premier chef, il fait savoir ne pas être en mesure de répondre à nos questions qui portent sur le cas d’un organisme d’assurance particulier.
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