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Clé de la neutralité climatique ou carte blanche au greenwashing ?

Dans un monde de plus en plus préoccupé par la lutte contre le changement climatique, l’Union européenne (UE) vise la neutralité climatique d’ici 2050. Un outil crucial pour cet objectif est la taxonomie de l’UE, un système classant les activités économiques considérées comme durables. Quatre ans après sa création, la Commission Européenne fait face à deux poursuites judiciaires remettant en question ses ambitions climatiques.
Introduite en 2020, la taxonomie sert de guide définissant les activités économiques durables. Dès 2023, les entreprises de plus de 500 salariés, ainsi que les investisseurs, doivent déclarer leur conformité à la taxonomie. Ce rapport clarifie l’alignement d’une entreprise, d’un projet ou d’un portefeuille avec les critères environnementaux.
Critiques
Les plaintes judiciaires actuelles montrent que la taxonomie n’atteint pas encore ses objectifs selon certaines parties prenantes. Une première plainte, déposée par des ONG, critique les objectifs d'émissions de l’UE pour 2030, jugés insuffisants pour respecter l’Accord de Paris. La seconde plainte attaque la taxonomie en affirmant que les critères de financement durable sont erronés, qualifiant d'écologiques des investissements polluants.
Les critiques de la taxonomie ne sont pas nouvelles. Elle a toujours fait face à des débats, notamment autour de l’inclusion de l'énergie nucléaire et du gaz naturel dans les activités durables, alors que d’autres secteurs potentiellement écologiques, comme l’agriculture, ne sont pas encore couverts. La complexité de ce cadre de durabilité est évidente.
De plus, l’aspect mondial des marchés financiers signifie que le succès de la taxonomie repose sur sa capacité à s’intégrer avec d’autres cadres. L’application en dehors de l’UE est complexe en raison de normes différentes et de difficultés d’accès aux données.
Précieux mais imparfait
L’ironie est que la taxonomie, censée combattre le greenwashing, pourrait en fait l’encourager en qualifiant certaines activités comme durables, même si elles ne le sont pas réellement. Cela abaisse la barre pour les entreprises polluantes.
En tant qu’investisseur à impact, nous soutenons l’intention de la taxonomie et son potentiel en matière de finance durable. Nous investissons uniquement dans des entreprises contribuant à rendre notre société plus durable, en tenant compte de la taxonomie. Cependant, ses limites actuelles nous empêchent de maximiser l’alignement de nos portefeuilles avec elle :
. Nous excluons les activités que nous ne considérons pas durables, telles que le gaz naturel et le nucléaire, bien qu’elles soient classées durables par la taxonomie.
. À l’inverse, nous investissons dans des activités que nous jugeons durables, mais qui ne sont pas encore couvertes.
. Nous investissons aussi dans des entreprises ayant des objectifs sociaux, non inclus dans la taxonomie.
. Enfin, lorsque les critères sont difficiles à évaluer, comme dans les marchés émergents, nous utilisons d’autres méthodes pour évaluer le potentiel durable.
Dans l’ensemble, la taxonomie représente un pas important vers un cadre normalisé pour la durabilité. Néanmoins, dans l'évaluation d’opportunités à impact mondial, elle doit être utilisée avec souplesse. Chez Triodos Investment Management, nous continuons d’investir dans des activités favorisant un objectif environnemental, malgré ses limites.
Cela inclut l’agriculture biologique, les projets d'énergie propre sur les marchés émergents et les start-ups qui travaillent sur des solutions résilientes, mais qui ne peuvent pas encore aligner leurs opérations sur la taxonomie.
Nous continuons également de plaider pour une amélioration de la taxonomie, soutenant des initiatives comme la taxonomie scientifique indépendante (ISBT). Le temps dira si la taxonomie deviendra réellement la clé pour une économie plus verte et atteindre la neutralité climatique d’ici 2050.
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