
La congestion des ports chinois obère la reprise économique

Les perturbations dans la chaîne d’approvisionnement mondiale ne sont pas près de se résorber. La fermeture partielle du port chinois de Ningbo, près de Shanghai, le deuxième du pays et le troisième au monde, depuis une semaine après la découverte d’un cas de Covid aggrave la congestion des installations portuaires en Chine et ravive l’inquiétude sur la reprise mondiale à quelques mois de la saison des achats de fin d’année.
Après les congestions successives à la première vague de Covid-19 et les perturbations causées par le blocage en mars dernier du canal de Suez, la fermeture d’un des terminaux du port de Ningbo (représentant un quart des capacités totales) est un nouveau coup dur pour la chaîne d’approvisionnement, déjà fragilisée par l’épidémie de coronavirus et la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine. Ce d’autant que cet incident intervient un peu plus d’un mois après la clôture du port de Yantian près de Shenzhen en juin dernier.
Ronds dans l’eau...
Cette fermeture est la conséquence directe de la stratégie «zéro Covid» menée par les autorités chinoises. L’activité est paralysée dès la détection d’un premier cas, les autorités imposant des mesures strictes au personnel et aux navires à l’arrivée, surtout s’ils proviennent de zones considérées comme à risque (Inde, Russie…). Et cela peut durer plusieurs semaines.
En juin, Yantian a été fermé près d’un mois. Dans le cas de Ningbo, les compagnies maritimes souhaitant accoster ne savent pas quand l’activité va reprendre et doivent soit attendre au large (mardi, plus de 50 navires mouillaient au large contre 28 avant la décision de fermer les installations le 10 août), soit se dérouter vers d’autres ports, ce qui augmente leur encombrement avec des répercussions dans d’autres pays de la région. Cela pourrait également réduire le nombre de containers disponibles. La situation est d’autant plus délicate que la congestion consécutive à la fermeture de Yantian en juin n’avait sans doute pas encore été résorbée (6 à 8 semaines pour un retour à la normale, selon les estimations) .
La crainte est que cette nouvelle perturbation n’exerce une pression supplémentaire sur l’expédition et l’approvisionnement des marchandises (produits électroniques, textiles à l’exportation depuis Ningbo et pétrole, produits chimiques et agroalimentaires à l’importation), freinant la croissance et entraînant une hausse des prix. Les problèmes du transport maritime agissent doublement sur l’économie mondiale: sur les échanges de marchandise (l’Asie du sud-est représente 42% des exportations mondiales, selon l’ONU) mais aussi sur l’inflation (les prix du fret maritime ont doublé depuis un an mais c’est aussi la conséquence des goulets d’étranglement).
L’impact est au niveau des industriels qui peinent à s’approvisionner en matières premières ou en composants intermédiaires. Ils n’ont d’autre choix que d’attendre et allonger leurs délais, faute de trouver d’autres sources d’approvisionnement. Il est aussi important pour les distributeurs.
Tensions sur les stocks
Une fermeture prolongée à Ningbo pourrait être particulièrement douloureuse pour l'économie mondiale car le commerce maritime augmente vers la fin de l’année alors que les entreprises expédient leurs produits pour la rentrée de septembre et les fêtes de fin d’année (Transksgiving, Noël…).
De fait, les stocks du secteur de la distribution aux Etats-Unis et dans la zone euro ont fortement chuté. Le ratio stocks rapportés aux ventes atteint un plus bas historique. «La faiblesse des stocks n’est pas caractéristique des phases de reprise économique, note Tamara Basic Vasiljev, économiste chez Oxford Economics. Nous l’interprétons comme un signe des perturbations et des goulets d'étranglement qui affectent la chaîne d’approvisionnement.» Et les prix élevés du fret maritime témoignent de la sévérité des perturbations au niveau mondial mais aussi du caractère transitoire de l’inflation, estime la spécialiste, qui n’anticipe pas d’amélioration avant 2022.
Tout dépendra notamment de la propagation du variant Delta. Cela pourrait entraîner d’autres fermetures de ports. «Désormais, tant la constitution de stocks que l’atténuation de l’inflation de manière plus permanente dépendront de l’efficacité avec laquelle les goulets d'étranglement dans les chaînes d’approvisionnement et en particulier dans le transport maritime seront résolus, ajoute l’économiste. Les nouveaux risques liés au variant Delta ont ajouté à la complexité de la lecture économique, mais nous pensons toujours qu’il s’agit d’une histoire de reprise plus longue mais toujours forte, plutôt que de nouveaux risques.»
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