
Dette privée : les institutionnels voient des points d’attraction et d’attention
La dette privée s’est imposée dans le paysage du financement et dans les portefeuilles des investisseurs institutionnels depuis une bonne décennie. L’événement Forum Private Equity France du mardi 4 avril 2023 a fait le point sur l’appétit de ces investisseurs lors d’un débat qui réunissait la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et la MACSF.
Les deux institutionnels n’ont rien de novices. Ils ont commencé à investir en dette privée il y a une dizaine d’années, quand la désintermédiation a fait naître les fonds dédiés. Si la Caisse a mis en place un programme d’investissement régulier - sur plusieurs segments -, qui monte encore en puissance, la MACSF a en revanche amorcé sa démarche avec de la dette mezzanine qui présentait alors l’avantage d’un rendement additionnel sous forme de warrants ou de bons de souscription d’actions. Quand cette caractéristique a disparu, l’assureur a cessé d’investir dans la classe d’actifs jusqu’à l’avènement de l’unitranche qui convient bien à ses contraintes d’assureur.
Il faut préciser qu’on est au modèle standard, au coût en capital plus élevé qu’avec un modèle interne, donc on doit aller chercher une zone de rendement assez élevée.
L’assureur constate que l’unitranche offre cela, avec parfois un petit «kicker» actions et la commission de montage séduisante. Du côté de la Caisse, la dette privée est perçue comme un produit de diversification, les portefeuilles de private debt viennent diversifier des portefeuilles de taux, comme le private equity le fait avec les actions.
On ne fait pas private equity versus fonds de dette, chacun vient diversifier les portefeuilles plus liquides.
L’environnement macroéconomique de l’année écoulée n’a pas vraiment remis en cause l’engagement des investisseurs dans la classe d’actifs. Le contexte a cependant fait réfléchir Olivia Yedikardachian. La responsable des portefeuilles de fonds à la CDC a pu voir qu’en fin d’année dernière les marchés cotés ont réagi beaucoup plus rapidement et que les spreads offerts sur les fonds de dette n’ont pas bougé aussi vite que les taux high yield. «C’est vrai qu’il y a eu un petit moment où on s’est dit qu’on pourrait presque arbitrer vers du high yield», a-t-elle indiqué. Mais elle ajoute préférer investir régulièrement, à travers les millésimes. Et que si les fonds de dette n’étaient pas parfaitement compétitifs au dernier trimestre, elle espère qu’ils le redeviennent fortement.
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L’extra financier reste un point d’attention
La dette privée a longtemps été en retard en matière environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) par rapport au capital investissement. Toutefois, de nombreux prêts privés sont désormais consentis avec une rémunération qui peut baisser avec l’atteinte d’objectifs extra-financiers. «On a vraiment maintenant de la part des fonds de dette un rôle fort sur l’ESG», estime la représentante de la CDC, pour qui l’engagement ESG doit se diffuser dans toutes les classes d’actifs.
Pour Roger Caniard, il reste encore du chemin, notamment avec la possibilité de faire payer plus cher les émetteurs qui n’ont pas progressé sur ces critères. Il croit aussi qu’il y a plus de levier pour faire bouger les entreprises en étant à leur capital, notamment sur les accords de partage de la valeur. «L’univers du non-coté au sens large fait déjà beaucoup sur ces sujets ESG mais le fait peut-être moins savoir que d’autres», conclut-il.
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