
Les ETF rebattent les cartes du secteur
Inexistants en Europe il y a 20 ans, les ETF pèsent 903 milliards de dollars dans la région, selon des chiffres d’ETFGI, fin octobre. Dans le monde, les encours atteignent 5.786 milliards de dollars. Le succès de ce nouvel instrument a bousculé le secteur de la gestion d’actifs en mettant la pression sur les coûts et en favorisant l’émergence de mastodontes.
Les deux premiers ETF en Europe ont vu le jour le 11 avril 2000 sur Deutsche Börse. Il s’agissait de deux fonds de Merrill Lynch sur les indices Dow Jones Euro Stoxx 50 et Stoxx 50. En France, il a fallu attendre janvier 2001 pour voir apparaître les premiers « trackers ».
« La réussite des ETF repose sur leur transparence, la faiblesse de leurs frais de gestion et leur accessibilité. Ces trois points continuent d’assurer leur succès et correspondent à l’évolution du secteur de la gestion d’actifs : transformation des marges – donc moins de frais de gestion –, pression des clients pour davantage de transparence et recherche de rendement sur des classes d’actifs ou thèmes spécifiques », résume Thibaud de Cherisey, directeur du développement des ETF en Europe chez Invesco.

Isabelle bourcier, responsable des gestions quantitative et indicielle, BNP Paribas AM
Pour autant, ces caractéristiques n’ont pas séduit les clients à destination desquels les ETF avaient été introduits en Europe : les particuliers. « Très vite, le produit s’est positionné comme une alternative aux ‘futures’ et aux dérivés pour les professionnels », se souvient Isabelle Bourcier, responsable des gestions quantitative & indicielle chez BNP Paribas Asset Management. Aujourd’hui, les particuliers ne représentent que 10 % à 15 % du marché des ETF en Europe.
Côté acteurs, les premiers fournisseurs d’ETF sont des banques d’investissement. « Mais à un certain moment, le modèle va basculer vers les ‘asset managers’. Et ce, sous une double pression : d’abord, les sociétés de gestion réalisent que ces produits font partie intégrante de l’offre de gestion. Ensuite, depuis la crise, les banques d’investissement ont besoin de capitaux et se délestent de ces pépites bien valorisées », relate Thibaud de Cherisey.

Thibaud de Cherisey, directeur du développement des ETF en Europe, Invesco
« Changement culturel »
Aujourd’hui, le marché en Europe est dominé par iShares (347,6 milliards d’euros le 30 juin 2019, selon Lipper from Refinitiv), loin devant Xtrackers (81,5 milliards) et Lyxor ETF (62,4 milliards). De nouveaux acteurs continuent d’arriver, que ce soit de petites structures de type HANetf ou Tabula, ou de gros acteurs de la gestion comme récemment Goldman Sachs.
Isabelle Bourcier observe que certaines sociétés qui veulent se lancer sur un nouveau marché optent pour le véhicule ETF afin de gagner du temps. « Avec un fonds traditionnel, le client demande 3 ans de ‘track record’. Il faut trouver des investissements de départ. Avec un ETF, les sélectionneurs de fonds exigent certes une taille minimum mais souvent seulement un an de ‘track record’, donc vous gagnez deux ans de commercialisation », détaille-t-elle.
Pour elle, « un changement culturel va se faire progressivement. On va arrêter d’associer le mot ETF au passif. On va parler de gestion indicielle et de gestion active et l’ETF deviendra une enveloppe juridique disponible parmi d’autres auprès des sociétés de gestion pour des aspects pratiques. »
Les perspectives de croissance devraient aussi être alimentées par l’environnement réglementaire porteur et la plus grande transparence imposée à l’industrie financière. Cela pourrait favoriser l’arrivée des particuliers sur le secteur, tant attendue par les fournisseurs d’ETF. La croissance viendra aussi des nouvelles offres qui se développent, notamment la gestion obligataire, jusqu’ici restée marginale. L’ESG est un autre domaine qui suscite un fort intérêt.
En attendant, les ETF collectent : 88,9 milliards de dollars depuis le début de l’année (ETP inclus), soit près du double des 47,71 milliards de la période correspondante de 2018, selon ETFGI. Dans ce contexte, Deborah Fuhr, co-fondatrice d’ETFGI, estime que le secteur pourrait franchir la barre des 1.000 milliards de dollars d’actifs en Europe dès cette année.
Laurence Marchal

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