
Le nouveau label ISR disqualifie les ETF

Les fonds indiciels ETF sont mal engagés pour bénéficier d’une labellisation dans la nouvelle version du label ISR (investissement socialement responsable). La gestion passive ne correspond pas aux nouvelles règles du jeu qui doivent entrer en application le 1ᵉʳ mars (avec une période de transition jusqu’au 1ᵉʳ janvier 2025), ni à l’esprit des membres du comité. «Les ETF ne sont pas exclus du label mais ils ne sont pas aidés… Les nouvelles exigences d’engagement actionnarial, la procédure d’escalade pouvant conduire jusqu’au désinvestissement, semblent difficilement compatibles avec les fonds indiciels. Le comité du label en est conscient, mais il considère que les ETF ne sont plus les bienvenus dans le label», rapporte Kim Nguyen, cofondateur du cabinet de conseil Kermit et auditeur certifié Afnor du label ISR, lors d’un webinaire des Acteurs de la Finance durable (AFR), mardi 23 janvier.
La demande d’engagement avec un grand nombre d’entreprises sur les enjeux ESG et les controverses, et l’obligation de présenter les résultats de ces opérations devraient disqualifier la cinquantaine d’ETF aujourd’hui labellisés ISR. L’analyse des plans de transition, ligne à ligne, des entreprises d’un fonds ISR rend aussi la tâche quasi impossible pour des gérants passifs. Autre difficulté technique, le poids minimum de 20% sur chaque pilier E, S et G au sein de la note qui sera compliqué à faire appliquer auprès des émetteurs.
Les gérants et investisseurs à l’heure des choix
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Lors des consultations précédant la refonte du label, Amundi, dont 16% de ses 112 fonds ISR sont en gestion passive (38 milliards), s’inquiétait vivement de ces conséquences. «Si des indices très concentrés étaient constitués, ils ne correspondraient pas au fonctionnement de la gestion passive qui vise à créer des solutions d’investissement fondées sur des économies d’échelle au bénéfice des clients finaux», interpellait le gestionnaire d’actifs. Les investisseurs institutionnels, attachés à l’ISR et de plus en plus attirés par la gestion passive, font aussi face à des enjeux contradictoires. «Il reste à voir si les grands fonds passifs proposés par BlackRock et Amundi s’aligneront sur les nouveaux critères», estimait Hortense Bioy, directrice mondiale de la recherche sur l’investissement durable chez Morningstar, dans son étude d’impact parue en novembre. Les sociétés de gestion disposant de moyens importants pourraient «contourner» ces difficultés, car il existe des «failles», rapporte Yasmine Puteaux, auditrice du label ISR et présidente de Kermani Conseil.
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Mais le comité du label est droit dans ses bottes. «Le comité soutient la démarche de l’ISR qui consiste à pousser les entreprises à améliorer leurs impacts environnementaux et sociaux, il est logique que la gestion passive sorte», commente Yasmine Putaux. Le comité souhaite durcir les règles pour sauvegarder la crédibilité du label. Le nouveau cadre représente des enjeux d’adaptation pour les gestions (exclusions fossiles, principales incidences négatives, plan de transition, engagement, reporting…) et des coûts opérationnels (humains, informatique) significatifs pour la gestion active comme passive. Un important travail attend les gérants s’ils veulent conserver le label. Sur les quelque 1.200 fonds labellisés ISR identifiés, 45% ont une certaine exposition au secteur de l'énergie traditionnelle, pour un total d’environ 7 milliards d’euros d’actifs, rappelait Morningstar. Selon les estimations du comité du Label et celles de Bercy, 26% à 40% des fonds sont menacés de déréférencement s’ils n’évoluent pas.
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