
Les régulateurs ciblent le risque de liquidité de la gestion d’actifs

Il aura fallu près de deux ans de travaux au Conseil de stabilité financière pour trancher. Le FSB a livré jeudi ses recommandations visant à remédier aux «faiblesses structurelles des activités de gestion d’actifs» et à limiter le risque systémique d’un secteur qui pesait 76.700 milliards de dollars d’encours en 2015. A la différence des banques, le régulateur a renoncé pour l’instant à établir un cadre pour les géants du secteur, comme BlackRock ou Vanguard, pour privilégier dans un premier temps une approche par les risques. Il pourrait rouvrir le dossier des gérants systémiques en 2019.
Quatre champs de vulnérabilité sont couverts par ces recommandations, qui avaient été soumises à la consultation l'été dernier: la liquidité, le levier des fonds, le risque opérationnel notamment en période de stress, et le prêt de titres (securities lending). A charge pour les autorités de régulation d’en tenir compte. L’Iosco, l’organisation internationale des gendarmes de marché, devra les préciser dans ses propres recommandations, d’ici fin 2017 pour la liquidité et fin 2018 pour le levier.
Sapin 2, la réponse française
Sur les 14 recommandations du rapport, 9 concernent le risque de liquidité, qui s’applique uniquement aux fonds ouverts, ETF inclus mais fonds monétaires exclus. Soit près de 40.000 milliards de dollars sous gestion. «Non seulement l’industrie des fonds a connu une croissance très rapide au sein du système financier, mais elle joue un rôle plus important que par le passé dans l’intermédiation financière. Elle tend aussi à investir dans des actifs moins liquides tout en offrant une liquidité quotidienne au moment où les intermédiaires traditionnels, comme les brokers-dealers, se retirent», explique un proche du dossier. Les difficultés des fonds ouverts investis dans l’immobilier britannique, au lendemain du vote sur le Brexit, offrent un exemple récent du risque encouru.
Le FSB demande notamment à ce que «les stratégies d’investissement et les actifs d’un fonds soient compatibles avec les termes et les conditions de rachat des parts du fonds». Des contraintes plus explicites pourraient par exemple viser la part des actifs illiquides logés au sein d’un véhicule à liquidité quotidienne. Autres recommandations, «les autorités devraient élargir la disponibilité des outils de gestion du risque de liquidité» d’une part (suspensions des rachats, décotes, etc.), et veiller à «réduire l’avantage du premier arrivé» d’autre part, pour éviter que les investisseurs retirant les premiers leur mise ne soient favorisés par rapport aux autres. L’utilisation de ces outils, souvent vécue comme aveu d’échec, devra être strictement encadrée,
La France vient d’avancer sur ce point grâce à la loi Sapin 2, qui généralise les barrières aux rachats («gates») en cas de circonstances exceptionnelles. L’Autorité des marchés financiers a achevé fin décembre sa consultation sur la manière dont ces barrières pourront être mises en place.
Le rapport du FSB préconise aussi la mise en œuvre, par les gestionnaires d’actifs, de tests de résistance au niveau de chaque fonds. Là encore, il reviendra à Iosco et aux autorités concernées d’en préciser le cadre, et notamment de dire à quels fonds ces stress tests doivent s’appliquer, en respectant un principe de «proportionnalité». D’autre tests, cette fois au niveau du système dans son ensemble, pourraient être menés.
Quant au levier dans les fonds – fermés comme ouverts –, il appelle trois recommandations, qui toutes ont trait à la collecte de données par les autorités et au calcul des mesures de leverage.
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