
Une gestion française effervescente

Il faut une bonne dose de courage ou d’insouciance pour lancer aujourd’hui sa société de gestion. Voilà un secteur parvenu il y a plusieurs années déjà au faîte de sa rentabilité, et promis à dévaler la pente sous la pression de taux bas et de réglementations toujours plus coûteuses. L’alpha, ce Graal qui mesure la valeur ajoutée du gérant pour l’investisseur en termes de performance par rapport à l’indice de référence, déserte certaines classes d’actifs cotés (lire notre Dossier page 20). C’est particulièrement vrai pour les obligations et pour des compartiments du marché où la mécanique implacable des fonds indiciels fait sa loi. Le retour en grâce annoncé des gérants actifs, dont les choix assumés seraient censés mettre l’épargnant à l’abri des retournements durables de tendance, se fait toujours attendre. Ce sont plutôt les déboires d’anciennes gloires du secteur qui ont alimenté la chronique en 2019.
Et pourtant, l’année qui s’achève devrait marquer un record dans le rythme de création de sociétés de gestion en France. Les demandes d’agrément auprès de l’Autorité des marchés financiers s’envolent depuis douze mois. La perspective du Brexit favorise largement ce mouvement de repli du Royaume-Uni vers le continent, où de grands assets managers européens ont aussi choisi récemment d’installer des dirigeants jusqu’à présents basés à Londres. A ce contexte politique s’ajoute une vraie dynamique entrepreneuriale. Les temps sont durs pour la gestion et pour certains pionniers ? Sans doute, mais le secteur affiche encore des niveaux de rentabilité bien supérieurs à ceux d’autres industries, et offre aux meilleurs professionnels l’occasion de bâtir de respectables fonds de commerce. Lorsqu’ils ne s’attaquent pas à la montagne des marchés d’actions et d’obligations, ces créateurs d’entreprise lorgnent du côté de l’immobilier, du capital-investissement ou de la dette privée, là où il est encore possible de faire valoir ses talents et de dégager de belles marges.
Cette effervescence entrepreneuriale fait la force de la Place financière de Paris. Loin de se réjouir du Brexit, celle-ci a vu dans cet événement historique l’occasion d’une profonde remise en question. Avec l’appui des pouvoirs publics, elle s’efforce depuis trois ans de reconstruire une attractivité trop longtemps écornée. Elle en touche les premiers dividendes. Face à la concurrence de Londres, du Luxembourg ou de Dublin, Paris peut s’imposer comme le centre européen où une nouvelle génération de gérants écrit aujourd’hui les success stories de demain.
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