
Le juste prix de la gestion

La gestion d’actifs ne vaut plus rien. L’américain Fidelity l’a clamé à la face du monde en lançant cet été des fonds indiciels cotés totalement gratuits pour contrer les géants des ETF aux Etats-Unis. Pourtant, ce grand nom de la gestion fondamentale n’annonce pas la fin du métier. Tout au plus celle d’un âge d’or qui voyait une industrie dégager de trop confortables marges sans toujours fournir à ses clients des performances d’égale ampleur (lire le Dossier, page 20).
La montée en puissance de la gestion passive et indicielle, largement commentée, contribue à mettre fin à cette anomalie ; elle n’est cependant pas la seule. Les politiques de taux bas ont rendu inacceptables les commissions trop élevées, les réglementations ont accru les points morts et forcé le secteur à ouvrir ses boîtes noires. Le pouvoir de négociation s’est largement déplacé du producteur au consommateur. Si la clientèle des particuliers reste lucrative, la baisse continue des frais de gestion institutionnelle signale l’extrême concurrence à laquelle se livrent, notamment en France, les asset managers. Ceux-ci ont trouvé la parade en promouvant des produits mieux margés qui répondaient à l’appétit de leurs clients pour les actifs réels ou la dette privée, mais dans ce domaine aussi, le pricing power s’érode. Et qu’en sera-t-il lorsque ces compartiments aujourd’hui très prisés connaîtront un violent retournement de cycle ?
D’aucuns estiment, comme Martin Gilbert, patron de Aberdeen Standard Investments (lire page 6), que la fin des années fastes sur les marchés donnera aux gérants actifs l’occasion d’un retour en force. Elle devrait plus sûrement encore accentuer la concentration spectaculaire des flux qui fait les beaux jours à la fois des grandes usines mondiales et des spécialistes les plus talentueux dans leur niche d’investissement. L’industrie, comme d’autres, n’échappe plus à la logique de prime au leader, et les acteurs moyens – par la taille et plus encore par les performances – ont du souci à se faire.
Encore faut-il que le secteur puisse préserver ce qui fait sa force et sa richesse, cet écosystème où de petits acteurs prospèrent à l’ombre des grandes maisons, et où la capacité d’innovation ne serait pas tuée dans l’œuf. L’attention s’est portée ces dernières années sur le niveau des frais, et avec raison. Mais celui-ci n’est pas la seule composante du meilleur rapport qualité/prix auquel l’investisseur a légitimement droit. Le juste prix de la gestion ne tend pas vers zéro, il doit rémunérer l’excellence et permettre de couvrir les investissements nécessaires à son maintien. C’est ce qui fait toute la valeur de l’asset management pour les épargnants et pour le financement de l’économie.
A l’occasion de la 17e édition du Global Invest Forum les 11 et 12 octobre 2018 (www.agefi.fr), retrouvez notre dossier bilingue pages 20 à 31
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