
L’amateurisme n’est plus de mise dans l’ESG

Il y aura un avant et un après DWS dans la finance durable. Le gestionnaire d’actifs allemand, qu’une ancienne salariée accuse d’enjoliver ses encours gérés selon des critères ESG, se trouve sous le coup d’enquêtes aux Etats-Unis et en Allemagne. Le cours de son action a plongé en Bourse. La filiale de Deutsche Bank, qui se défend de tout abus, n’est pourtant pas la plus démonstrative dans un secteur ayant fait de l’environnement, du social et de la gouvernance les vertus cardinales de sa politique de placement. C’est toute l’industrie de l’asset management qui se voit aujourd’hui rattrapée par la menace du greenwashing : à trop se prétendre vert, le risque est d’induire l’investisseur en erreur et de s’attirer des sanctions.
Les débats sur la nature de l’ESG sont aussi vieux que le concept. Les définitions, multiples et fluctuantes au gré des appellations – investissement socialement responsable, autrefois, ou à impact, désormais. Aucune norme, aucun label ne se sont encore imposés. L’intégration de critères environnementaux mal définis dans des fonds qui ne sont pas spécifiquement identifiés comme tels ouvre la voie à toutes les interprétations. Ce flou artistique sert les intérêts de tous les fournisseurs de produits financiers et des entreprises dans lesquelles ils investissent. Les émissions de dette verte ou sociale inondent les marchés de capitaux, les nouveaux convertis sont les premiers à prêcher la religion de l’ESG, et l’argent des épargnants coule à flots. Même les Big Four de l’audit promettent d’accroître massivement leurs compétences dans ce domaine, en espérant au passage faire oublier les peu glorieuses affaires qui ont écorné leur image. Impossible d’échapper au phénomène sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la finance, d’autant que de grandes coalitions mondiales d’investisseurs se constituent pour faire régner l’ordre nouveau.
Si tout devient ESG, celui-ci a-t-il encore un sens ? Les observateurs les plus radicaux, comme l’ancien responsable de l’investissement durable de BlackRock, n’y voient qu’un écran de fumée masquant aux yeux des gouvernants et des citoyens l’urgence climatique et les mesures drastiques qu’elle impose dès à présent. Il est permis de recentrer la critique sur le greenwashing sans tirer un trait sur tous les efforts entrepris. A son niveau, la gestion d’actifs a un rôle indispensable à jouer dans la transition verte. Elle a tardé à l’assumer, et ne l’a embrassée pleinement qu’une fois convaincue de son intérêt commercial. Place désormais à l’âge de la maturité : il lui faut des données extra-financières de qualité et des normes qui ne souffrent plus l’à-peu-près. Avant que les superviseurs ne s’en chargent, le temps est venu de trier le bon grain de l’ivraie.
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