L’actualité des grandes banques centrales de la planète, celles de la zone euro (BCE), des Etats-Unis (Fed), du Royaume-Uni (BoE), du Japon (BoJ). Nos analyses et éclairages sur les politiques monétaires mises en œuvre par ces autorités au cœur de l’économie mondiale.
La livre turque s’est dépréciée jusqu’à plus de 1% jeudi, l’une pires performances parmi les devises émergentes, à 8,56 face au dollar. La monnaie turque est sous pression après que le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau réclamé une baisse des taux malgré la forte hausse de l’inflation. Cette dernière a surpris en juillet à 18,95%. La banque centrale turque doit se réunir jeudi 12 août. Les opérateurs anticipent un maintien du principal taux directeur à 19%, son gouverneur s‘étant engagé à maintenir les taux au-dessus de l’inflation. Mais les déclarations du président turc brouillent cette perspective. Des taux réels négatifs seraient défavorables à la livre turque au moment où la Fed pourrait s’engager dans une normalisation de sa politique monétaire.
La banque centrale australienne (RBA) a surpris les marchés mardi en confirmant sa décision prise en juillet de réduire son programme d’achat d’obligations à partir de septembre de 5 milliards de dollars australiens par semaine à 4 milliards. Les opérateurs s’attendaient à un montant d’achats plus élevé voire stable alors que l’économie australienne est affectée par le variant Delta. Mais la RBA s’attend à ce que le coup porté à l'économie soit temporaire, son gouverneur ayant souligné la reprise forte de l’économie depuis 2020. La RBA a par ailleurs maintenu son taux directeur à 0,1% pour sa huitième réunion consécutive, une décision largement attendue. Elle a réitéré que les taux d’intérêt ne seront pas relevés tant que l’inflation ne se situera pas durablement dans sa fourchette cible de 2 à 3 %, un objectif qui ne sera probablement pas atteint avant 2024. Le dollar australien s’est apprécié de 0,4% face au dollar américain après cette annonce.
La politique monétaire des Etats-Unis est trop accommodante au regard de la croissance rapide, de la forte inflation et du «début d’une bulle dans l’immobilier», a prévenu vendredi le président de la Réserve fédérale de Saint-Louis, James Bullard. Il a invité la banque centrale américaine (Fed) à se prononcer, lors de sa réunion de septembre, sur un plan visant à réduire progressivement ses 120 milliards de dollars (101 milliards d’euros) d’achats mensuels d’obligations prévus jusqu'à fin mars 2022. «L’ensemble de la communauté des banques centrales est en mode accommodant depuis longtemps. Si les données se retournent contre nous, nous devrions peut-être agir rapidement et cela peut être perturbateur», a-t-il plaidé.
Pierre Wunsch, membre du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE), a déclaré vendredi qu’il n'était pas à l’aise avec les nouvelles orientations de l’institution de maintenir des taux bas pour plusieurs années. Il est, avec l’allemand Jens Weidmann, l’un des deux seuls gouverneurs de la BCE à s'être opposé à la décision prise jeudi de retarder toute hausse des taux tant que l’inflation n’aura pas atteint l’objectif de 2%. «Mon désaccord ne devrait pas être dramatisé», a déclaré le gouverneur de la Banque de Belgique à CNBC, ajoutant toutefois que la BCE s'était liée les mains pour les années à venir et que son indépendance vis-à-vis des gouvernements pourrait être remise en question.
Le taux d'intérêt moyen des crédits immobilier a chuté à un niveau inédit de 1,06%. Mais l’impact est limité par l’allongement de la durée des emprunts.
Michael Saunders, l’un des membres du Comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre (BoE), a déclaré jeudi que la banque centrale pourrait décider plus tôt que prévu de mettre fin à son programme d’achats d’obligations d’Etat (QE) en raison de l’accélération inattendue de la hausse des prix. L’inflation au Royaume-Uni a atteint 2,5% sur un an en mai selon les statistiques officielles publiées mercredi. Après le gouverneur adjoint Dave Ramsden mercredi, Michael Saunders ne semble pas craindre d’effet du variant Delta et estime qu’une poursuite du QE, pourtant réduit en mai, jusqu’à la fin de l’année, lorsque l’inflation dépasserait 3%, risquerait d’ancrer des anticipations d’inflation élevées. La BoE s’était engagée en novembre à acheter pour 100 milliards de livres supplémentaires d’obligations d’Etat en un an. Lors des réunions monétaires de mai et juin, l’économiste en chef Andy Haldane, peu accommodant mais sur le départ, avait été le seul à se prononcer en faveur d’un arrêt prématuré.
Tout ça pour ça ? Les résultats de la revue stratégique de la Banque centrale européenne, la première depuis 2003, ont forcément déçu les exégètes de la politique monétaire. L’exercice a accouché d’un consensus mou. La paix avec le camp des faucons, à laquelle la présidente de la BCE Christine Lagarde se montre bien plus attachée que son prédécesseur Mario Draghi, était à ce prix. L’institution a, comme prévu, fixé une cible d’inflation à 2 % en zone euro et a rendu cet objectif symétrique, ce qui l’amènera à tolérer un léger dépassement. De quel ordre et pour quelle durée ? Le Conseil des gouverneurs s’est volontairement borné à une formulation imprécise. Les investisseurs devront se faire leur propre opinion en analysant les discours des uns et des autres. Bien malins ceux qui pourront bâtir sur ce sable une fonction de réaction claire et modéliser le lien entre les objectifs et les actions de la BCE. Un même flou artistique, déjà, entourait les conclusions que la Réserve fédérale avait livrées l’été 2020, mais la revue stratégique de la banque centrale américaine se voulait tout de même plus ambitieuse.
La Banque centrale européenne (BCE) modifiera les orientations sur l’évolution future de sa politique monétaire («forward guidance») lors de sa prochaine réunion le 22 juillet afin de refléter sa nouvelle stratégie et de montrer sa détermination à relancer l’inflation, a déclaré Christine Lagarde au cours d’une interview à Bloomberg TV lundi. Jeudi, la BCE a arrêté une nouvelle stratégie monétaire autour d’un objectif d’inflation symétrique de 2% à moyen terme, dont beaucoup d’analystes doutent qu’elle se donne les moyens de le rejoindre. «Compte tenu de la détermination dont nous devons faire preuve pour atteindre notre engagement, le pilotage des anticipations (‘forward guidance’) sera certainement réexaminé», a indiqué la présidente de l’institution. Christine Lagarde n’a pas précisé en quoi le pilotage des anticipations pourrait changer, se contentant de dire que l’objectif de la BCE sera de maintenir un crédit facile et de dire que ce n’est pas le bon moment pour discuter d’une réduction du Programme d’achats d’urgence (1.850 milliards d’euros jusqu’à mars 2022).