L’organisation non-gouvernementale suisse Public Eye appelle le Conseil fédéral suisse à réguler le négoce des matières premières, pointant dans un rapport «l’inaction» de l’institution face aux défis liés au respect des droits de l’homme et de l’environnement dans les pays producteurs et à la lutte contre la corruption. En mars 2013, le Conseil fédéral estimait que ces défis induisaient « des risques pour la réputation de la Suisse », explique Public Eye dans un communiqué, avant d’ajouter que l’institution a rejeté toute proposition visant à réglementer ce secteur. «Depuis 2015, il n’a approuvé qu’un seul des huit motions et postulats débattus au Parlement, préférant miser sur d’inefficaces mesures volontaires et des dispositions alibis,» indique l’ONG. Le bilan de la lutte contre la corruption est particulièrement pointé du doigt. «Gunvor au Congo, les Paradise Papers ou les récentes révélations sur l’affaire Petrobras : de nombreux cas ont montré que les prises de risques élevées et les pratiques douteuses font partie du modèle d’affaires des négociants helvétiques, qui n’hésitent pas à recourir à des intermédiaires sulfureux ou à s’associer avec des personnes politiquement exposées pour conquérir des marchés,» développe Public Eye, qui rappelle que l’OCDE a enjoint la Suisse à soumettre le négoce de matières premières à «une régulation adaptée et contraignante» en mars 2018. Un projet de loi sur la transparence des paiements aux gouvernements des pays producteurs, ficelé par les autorités helvétiques et qualifié de «farce politique» par l’ONG, limite cette obligation aux sociétés extractives, soit seulement «4 des quelque 544 sociétés établies en Suisse» d’après Public Eye qui relève que les sociétés suisses sont dans leur grande majorité impliquées dans le négoce et non l’extraction. Concernant le respect des droits humains, un groupe de travail composé de représentants de la branche, de l’administration et de la société civile, avait été initié par le Conseil fédéral en 2013. Une initiative à laquelle avait pris part l’ONG et qui avait débouché sur une guidance. Cependant, Public Eye note que l’administration «a refusé d’introduire un mécanisme d’évaluation de sa mise en œuvre,» laissant les sociétés le choix de l’appliquer ou non.