Les fonds de performance absolue obligataire (absolute return bond) les plus chers en termes de frais ne figurent pas parmi les plus performants. Il s’agit là d’une des conclusions d’un rapport publié cette semaine par ClearGlass, une plateforme britannique qui permet aux investisseurs institutionnels de déterminer les frais réels que leur font payer les gérants à qui ils ont confié leurs mandats. La firme a comparé les données disponibles dans la littérature publique des fonds de performance absolue obligataire et celles collectées dans le cadre de la Cost Transparency Initiative (CTI) sur ces mêmes fonds. La CTI a été développée par un groupe de travail du régulateur anglais des marchés financiers Financial Conduct Authority et vise à collecter des données sur les négociations liées aux frais de fonds dans le cadre de mandats de clients institutionnels. Pour ce qui est des fonds de performance absolue, les institutionnels payeraient 16 à 26 points de base de frais en moins que les frais affichés dans la littérature publique de ces mêmes fonds, calcule ClearGlass. Le problème selon ClearGlass est qu’en raison de ces deals non transparents (les données ne sont pas disponibles publiquement, ndlr), les investisseurs institutionnels ne disposent d’aucun signal de marché pour rediscuter les frais et la concurrence des prix n’existe pas. En clair, un institutionnel pourrait payer 70 points de base pour un fonds de performance absolue obligataire là où par exemple, la médiane serait de 60 points de base. L’institutionnel ne pourrait pas le savoir car l’opacité des deals rend difficile l'établissement d’un référentiel. Les consultants qui négocient les mandats pour les institutionnels se retrouvent dans la même situation et ne peuvent pas utiliser de référentiel solide puisqu’ils ne connaissent que le niveau de frais qu’ils ont négocié pour leurs clients et pas celui négocié par les autres consultants pour d’autres institutionnels. «Les implications de la différence des niveaux de frais entre les données collectées auprès de sources publiques et de consultants et celles qui sont spécifiques aux transactions et aux clients sont profondes et contribuent à un marché inefficace et stagnant. Malheureusement, l’absence de données précises accessibles au public a, jusqu'à présent, considérablement faussé le marché des fonds de performance absolue obligataire, les données publiques restant peu fiables et erronées.Les investisseurs et les gestionnaires d’actifs qui ont un bon rapport qualité-prix bénéficieraient grandement de la transparence qu’offrent les données de la CTI», analyse Christopher Sier, directeur de recherche chez ClearGlass. Deux sociétés de gestion se démarquent L’étude de ClearGlass suggère qu’il existe une corrélation négative, faible cependant, entre les fonds de performance absolue obligataire aux frais les plus élevés et leurs performances. En d’autres termes, les fonds concernés ne justifient pas de meilleurs rendements ou performances malgré leurs frais élevés. La plateforme indique que les investisseurs en auraient davantage pour leur argent en se tournant vers des fonds aux frais moins élevés. Sur les données des fonds de 31 gestionnaires analysés, ClearGlass met en avant deux sociétés de gestion obligataires, BlueBay Asset Management et Reams Asset Management, dont les fonds de performance absolue obligataires se trouvent à la fois dans le premier quartile en termes de performances et de frais les moins élevés. La plateforme identifie les fonds de deux autres gestionnaires qui pourraient rejoindre l’«élite», à savoir ceux de Fidelity International et Columbia Threadneedle, car figurant dans le premier quartile en termes de performances mais seulement s’ils réduisent leurs frais. Ils figurent selon ClearGlass dans le troisième quartile en termes de frais. Les fonds d’Aegon Asset Management et Newton Investment Management figurent, eux, dans le deuxième quartile en termes de performances et de frais. Enfin, ClearGlass observe que les fonds de performance absolue obligataire de trois gérants (BlackRock, Goldman Sachs AM, Insight Investment) figurent dans le troisième quartile soit en termes de frais soit en termes de performance. Performance au top, frais de transactions moins élevés Les données traitées par ClearGlass relèvent aussi une corrélation entre les frais de transactions et la performance des fonds de performance absolue obligataires. Autrement dit, les fonds de performance absolue obligataires aux coûts de transactions les moins élevés figurent dans le premier quartile des fonds les plus performants. Les coûts de transactions pour les fonds les plus performants seraient de 0,01% contre 0,35% pour les moins performants là où ceux des fonds dont la performance se trouve dans la médiane seraient de 0,11%. Autre enseignement de l’étude, les données disponibles publiquement pour les fonds analysés (les rapports et prospectus de fonds, ndlr) suggèrent que plus les institutionnels augmentent leur allocation dans un fonds, plus ils paient de frais. Là où les données collectées via la CTI (frais négociés dans le cadre de mandats institutionnels) montrent l’inverse, à savoir que plus les institutionnels augmentent leur allocation, moins ils paient de frais. Enfin, le manque de transparence du marché des fonds de performance absolue obligataire induit selon ClearGlassune «lourde distorsion du marché» qui pousse les gérants à optimiser les frais courants de leurs fonds au 40ème centile du marché, en se basant sur les données publiques,alors qu’ils pourraient le faire à partir du 22ème centile, en se basant sur les données non-publiques.