- PARTENARIAT
« Les fonds de dette, prêteurs alternatifs sur le marché immobilier, ont un rôle majeur à jouer »


Quels sont vos constats concernant le financement des investisseurs en immobilier ?
Le relèvement brutal des taux de financement de l’ordre de 400 points de base (l’Euribor passant de 0 à 3,80% en quelques mois) a provoqué une chute des volumes de transactions : ils ont reculé de 61% à 65 milliards d’euros au premier semestre sur l’immobilier commercial en Europe et le recul est attendu à -44% sur l’année 2023 (selon Savills). Nous assistons à une situation de blocage, car beaucoup de vendeurs ne sont pas encore prêts à acter la baisse des prix. Ce phénomène est accéléré par la fermeture par les banques du robinet du crédit, ces dernières se focalisant principalement sur la gestion des encours existants (bris de covenants, extensions, amendements ou même cas de défaut).

Dans ce contexte, comment ce marché du financement immobilier devrait-il se reconfigurer ?
Nous devons anticiper l’arrivée d’un mur de refinancement pour ces investisseurs en immobilier commercial. Il est évalué par AEW à 93 milliards d’euros à l’horizon de 4 ans (sur la période 2023-2026), au total sur les marchés français, allemand, hollandais, espagnol italien et britannique. Or ils devront faire face à des conditions beaucoup plus strictes, avec une baisse de la quotité de financement disponible de 65 à 50-55% de la valeur du bien (LTV), couplée à une correction à la baisse des valorisations. Dans cette perspective, les prêteurs alternatifs, les fonds de dette spécialisés, ont un rôle majeur à jouer, en particulier sur le « mid-market », soit des financements unitaires de 10 à 50 millions d’euros. Ce segment du marché, qui est historiquement celui sur lequel opère Sienna Private Credit, est le plus actif.
Sienna Private Credit prête en direct aux acteurs de l’immobilier. En quoi est-ce un avantage dans ce contexte ?
Prêter en direct aux investisseurs est un atout, car nous choisissons nous-mêmes les opérations immobilières que nous souhaitons financer et nous structurons nous-mêmes les financements, afin de les octroyer aux conditions que nous avons décidées. Nous nous adaptons à la réalité, à la complexité de chaque opération et nous initions un dialogue en direct avec chaque emprunteur, afin d’identifier en amont les difficultés éventuelles.
Comment prenez-vous en compte les nouvelles tendances à l’œuvre sur le marché de l’immobilier commercial ?
Le marché immobilier a profondément changé. L’évolution des usages dans l’univers de l’immobilier de bureau engendre des besoins d’investissement massifs pour y répondre. La transformation de bureaux obsolètes en locaux résidentiels par exemple, sont des projets lourds, qui nécessiteront en particulier des discussions avec les collectivités sur les nouveaux besoins de services aux habitants à réaliser (infrastructures, réseaux, écoles, commerces). Novaxia évalue à 20% le parc immobilier de bureaux d’Ile-de-France obsolètes, soit 11 millions de m² qui devront être transformés. Dans cette perspective, en tant que financeur, nous devons faire le tri entre les actifs économiquement viables et ceux qui nous paraissent ne pas l’être.
« A travers une stratégie de dette immobilière à impact, nous privilégions une politique d’incitation »
Comment mettez-vous en œuvre une stratégie d’impact sur la classe d’actifs dette immobilière ?
Sienna Private Credit a élaboré le premier fonds de dette immobilière à impact en France en 2021. A travers des clauses d’impact nous avons souhaité mettre en place une politique d’incitation vis-à-vis de propriétaires immobiliers, plutôt qu’une politique de contrainte. Nous établissons ensemble des objectifs d’amélioration de l’empreinte environnementale des bâtiments relative, à la consommation d’énergie, aux émissions de gaz à effet de serre, à la gestion des déchets, à la consommation d’eau. Des engagements sur les travaux à envisager doivent être pris et l’évolution de la marge du crédit, à la hausse ou à la baisse, dépendra de leur réalisation. L’amélioration de l’empreinte environnementale d’un bâtiment aura une influence sur sa liquidité, aussi bien sur le plan de l’investissement que sur le plan locatif. Nous nous intéressons en effet aux actifs qui doivent et qui peuvent être repositionnés selon les dernières trajectoires climatiques, dont nous accompagnons la nécessaire transition environnementale.
Sur quelles ressources vous appuyez-vous au sein du groupe Sienna Investment Managers ?
Sienna Private Credit est une expertise de Sienna Investment Managers et outre son équipe interne dédiée à la dette privée immobilière, elle s’appuie sur les équipes d’investissement de Sienna Real Estate. En cette période de transformation et d’incertitudes sur le marché immobilier, bénéficier de l’appui d’une centaine d’experts locaux, en France, en Allemagne, en Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, de leur très fine capacité d’analyse, est crucial. Nous avons ainsi construit des synergies très fortes, afin d’appréhender les actifs dans leur globalité et non seulement sous l’angle du financement et ceci au bénéfice de nos clients investisseurs.
Quelle nouvelle initiative êtes-vous décidés à prendre au regard du contexte actuel ?
Nous travaillons sur une nouvelle initiative dans le domaine de la dette immobilière à impact, adaptée aux nouveaux paradigmes de marché. Nous nous concentrerons sur des financements unitranches et mezzanines, sur le mid-market dans différents pays européens sur lesquels les équipes de Sienna sont présentes et sur l’ensemble des classes d’actifs immobilières (bureau, résidentiel, logistique, co-living (senior ou étudiant), hôtellerie). Le rendement attendu actuellement sur ce segment de marché est proche de l’equity, à 8-10%, avec un profil de risque inhérent à la dette immobilière.
Sienna Private Credit est la marque commerciale de Sienna AM France, une société de gestion agréée par l’Autorité des Marchés Financiers sous le n° 97118.