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L’environnement de taux, un marqueur clé pour 2025

La classe d’actifs suit une trajectoire de long terme porteuse. Le marché des actifs privés était évalué en 2020 à 13.000 milliards de dollars dans le monde et est estimé pour fin 2025 à 17.000 milliards, ce qui représente une croissance annualisée de l’ordre de 10 %.
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Night view on the facade of the modern building  - 

« Toutes les stratégies n’avancent pas à la même vitesse, souligne cependant Riccardo Stucchi. Ce sont le private equity et les infrastructures equity qui progressent le plus rapidement avec des taux de croissance de l’ordre de 12 % à 15 % par an en moyenne. » Ces chiffres devront toutefois être réévalués à la lumière de l’impact significatif de la hausse des taux de 2022 dans l’essor de ces stratégies. « Nous n’arriverons peut-être pas aux objectifs prévus pour toutes les classes d’actifs et nous verrons certainement un repositionnement des priorités des investisseurs, prévient Riccardo Stucchi. Ainsi, nous anticipons une baisse d’intérêt pour le private equity classique et un report des allocations vers les investissements en equity dans les infrastructures, notamment en raison de la distribution régulière permise par cette classe d’actifs. »

Certains secteurs devraient davantage profiter de cette croissance. Cette classe d’actifs est en effet portée par des tendances structurelles lourdes. « La transition énergétique est la première d’entre elles avec toutes les infrastructures liées à la génération, le stockage et la distribution d’énergie, rappelle Riccardo Stucchi. La seconde est indiscutablement la transformation digitale, qui implique un besoin énorme d’infrastructures telles que des data centers, des tours de télécommunications, la fibre optique, etc. Or il existe un décalage entre les capitaux à investir et les capitaux publics et bancaires disponibles. » A ces deux piliers, Russell Investments ajoute une troisième tendance forte : le social. « Nous soutenons les organismes publics en travaillant avec des municipalités ou des hôpitaux dont les besoins de financement sont colossaux », rapporte Riccardo Stucchi.

Plusieurs tendances se dessinent pour 2025 alors que la baisse des taux d’intérêt devrait progressivement favoriser une reprise des transactions. « L’année 2025 commence dans la continuité de 2024, note Riccardo Stucchi. Nous nous attendons à une reprise des fusions-acquisitions et des introductions en Bourse grâce à l’amélioration des conditions de financement. Mais le calendrier est difficile à anticiper, ce qui invite à la prudence. Au fur et à mesure que les taux d’intérêt vont baisser, les analyses des cash-flows des différents acteurs vont évoluer et nous devrions assister à une convergence graduelle des valorisations. » Un tel changement pourrait se produire dans le courant du premier semestre 2025. Quant à l’actualité politique, elle ne devrait pas trop affecter les infrastructures, projets de très long terme par nature. « L’instabilité politique en Europe entraîne une certaine prudence et un ralentissement des investissements industriels, alors que les dépenses sur les infrastructures sont largement encadrées par des directives européennes, ce qui leur confère une meilleure visibilité, explique Harold d’Hauteville. Aux Etats-Unis, en revanche, nous pourrions assister à une forme d’attentisme en début d’année, le temps que Donald Trump installe son administration. »

D’un point de vue sectoriel, la transition énergétique et les infrastructures digitales restent des domaines cruciaux dotés de solides perspectives de croissance. Les transactions y restent actives malgré le niveau des taux d’intérêt. « Nous allons par ailleurs assister à un redémarrage des transactions dans le secteur des transports, qui a été très affecté par la crise du Covid, relate Harold d’Hauteville. Nous observons de nombreuses opportunités dans ce secteur car certains investisseurs sont contraints de vendre ces actifs qu’ils n’ont pas pu céder pendant la pandémie. » Plus globalement, les secteurs contracycliques, ou a minima moins dépendants de l’économie, suscitent l’intérêt. « Les activités en quasi-monopoles, qui fournissent des services essentiels, connaissent une faible élasticité de la demande », remarque Riccardo Stucchi.

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Le marché secondaire, en plein essor, devrait rester animé cette année. « Nous constatons une réelle accélération de l’activité pour les stratégies de secondaire, fait savoir Harold d’Hauteville. Elles offrent de la liquidité à certains gérants et permettent à des investisseurs de déployer des capitaux à des points d’entrée intéressants. » Les décotes restent toutefois minimes pour les actifs de bonne qualité. « Les valorisations n’ont pas baissé dramatiquement, assure Riccardo Stucchi. Pour nous, le secondaire ne représente pas une possibilité d’acheter à prix réduits, mais plutôt une opportunité pour repositionner les portefeuilles, afin de donner une continuité à certains projets. »

Autre sujet d’actualité : le mouvement en faveur de structures evergreen, enclenché par l’expansion du marché des particuliers mais pas uniquement. « Ce format s’adapte particulièrement bien aux infrastructures et à la dette privée, qui disposent d’une forte prédictibilité des entrées et sorties de trésorerie », indique Riccardo Stucchi. Il n’est toutefois pas adapté à toutes les stratégies, en particulier celles visant une forte appréciation des actifs à terme, juge Harold d’Hauteville. « Dans le cas d’une approche Core+, vous faites l’acquisition d’un actif auprès d’un industriel et vous le faites croître, vous transformez son profil de risque pour, finalement, revendre un actif Core qui sera plus facilement détenu par un acteur de long terme de type fonds ouvert ou investisseur en direct, élabore-t-il. Dans ce cas, à la fin de la période de détention, le coût du capital initial attendu n’est plus adapté pour investir dans ces actifs dérisqués. »

Pour profiter des opportunités à venir, plusieurs types de gérants se démarquent. « Nous assistons à une polarisation des acteurs dans les actifs privés avec, d’un côté, des entités de très grande taille, dotées de fonds de plusieurs milliards d’euros et, à l’extrême opposé, des spécialistes plus petits, très agiles, qui peuvent déployer les capitaux rapidement, analyse Riccardo Stucchi. Alors que les premiers vont sur des méga-deals, les seconds peuvent réaliser des opérations plus spécifiques, sur de plus petits montants. » Ces acteurs de taille moyenne sont plus à mêmes d’intégrer des besoins locaux. « Depuis le Covid, les opérations en infrastructures tendent à se régionaliser, avec une politique de défense des intérêts locaux, avec des initiatives pour protéger les petites et moyennes capitalisations françaises, italiennes allemandes ou américaines afin de soutenir l’économie locale », poursuit-il. Une évolution à mettre en parallèle avec le contexte géopolitique. « Les considérations politiques prennent une importance de plus en plus grande, souligne Harold d’Hauteville. Par exemple, certaines données ne peuvent plus franchir les frontières. Donc avoir des centres de données qui sont exclusivement détenus par des acteurs américains ou chinois devient un problème. Au contraire, posséder des actifs européens devient stratégique. Plus généralement, beaucoup de secteurs des infrastructures font l’objet d’autorisations gouvernementales quand un investisseur non européen veut en faire l’acquisition. C’est le cas dans les secteurs de la santé, des télécoms, des aéroports… » A ces acteurs s’ajoutent par ailleurs des allocataires, chargés de sélectionner les gérants adaptés et de construire des portefeuilles. « Pour certaines catégories d’investisseurs, ceux qui démarrent dans cette classe d’actifs ou qui n’ont pas les compétences internes ni les outils pour sélectionner des deals, un travail d’allocation, de sélection et de diversification, à l’instar de celui qui est proposé par Russell Investments, prend tout son sens », estime Riccardo Stucchi.

Des atouts préservés

Les infrastructures forment une classe d’actifs récente, qui s’est développée depuis une dizaine d’années. « Lorsque nous levions nos premiers fonds, nous vendions un investissement générant un rendement plus attrayant qu’une stratégie de taux sans avoir la volatilité d’une stratégie actions, se remémore Harold d’Hauteville. Cette promesse a été largement tenue jusqu’en 2022, y compris pendant la pandémie. Le changement majeur intervenu en 2022 a encore confirmé la résilience de la classe d’actifs car les valorisations ont fait preuve de stabilité et le rendement est resté au rendez-vous. » Cependant, la remontée des taux d’intérêt a apporté une nouvelle concurrence en matière de placements. « Les investisseurs en quête de rendement ont maintenant des alternatives dont le crédit, qui a été l’un des grands bénéficiaires de l’environnement actuel, reconnaît Harold d’Hauteville. Néanmoins, le segment Core, le moins risqué, est resté assez stable en matière de collecte. » A cet atout majeur, les infrastructures affichent deux autres caractéristiques prisées des investisseurs. La première d’entre elle réside dans son caractère diversifiant et décorrélant des marchés actions, obligataires et même immobiliers, les infrastructures étant peu liées à la croissance économique. « En outre, elles ont permis de couvrir l’inflation, ajoute Riccardo Stucchi. Les rendements ont crû, avec un décalage temporel, et les infrastructures ont totalement joué leur rôle d’amortisseur. »